Quand l'histoire prend vie !
 
 

Icare

IcareFils de Dédale, le merveilleux architecte du Labyrinthe, peut-être Icare s'est-il cru prémuni pour toujours contre le labyrinthe de la vie ? Peut être a-t-il cru de bonne foi, la bonne foi de la déraison, qu'il pouvait faire n'importe quoi...
Comme voler, par exemple, et jusqu'au soleil encore ! Voici le détail de l'histoire: le labyrinthe construit par Dédale se trouve en Crète où règne le roi Minos. Minos veut garder Dédale et son fils prisonniers dans l'île et pour qu'ils ne puissent s'échapper par la mer, il a fait enlever tous les bateaux des ports. Mais quand on a imaginé un labyrinthe comme Dédale, et qu'on l'a réalisé, on n'est pas à court d'idées! La mer est interdite ? Il reste les airs.

Et Dédale fabrique des ailes. Deux paires d'ailes, une pour lui, une pour son fils Icare. Il coud ensemble les plus grandes, celles qui partent des omoplates, et il soude simplement les plus légères avec de la cire. Tout en fixant les ailes d'Icare, Dédale lui recommande de ne surtout pas voler trop haut: en s'approchant du soleil, il risque de faire fondre la cire.

Ils s'envolent... L'air est pur, bleu, on respire la transparence et la transparence a goût de fumée. Dédale et Icare voient passer au-dessous d'eux les dernières petites maisons blanches de la Crète, au loin le palais de Minos, roc d'ivoire. Ivre de liberté, saoul d'air , Icare vole maintenant bien au dessus de la mer qui brille comme un bouclier, bien au-dessus des grands oiseaux planeurs, bien au-dessus du vent qui couvre les appels de son père... Toujours plus haut, toujours plus haut! Il ne peut s'arrêter, il ne peut pas s'empêcher d'aller plus haut. Il s'approche du soleil. Pourquoi se prend-il pour un oiseau ? Mais les oiseaux, eux, ont les pieds sur terre... Ils ne montent jamais si haut.

Il se prend pour un dieu. Cela, aucun dieu jamais ne l'a accepté, ni jamais ne l'acceptera. La cire de ses petites ailes commence à fondre. Icare ne sent rien, même pas la chaleur sur son dos, même pas la brûlure de la cire en fusion. Oui, les ailes fondent. Ébloui encore, Icare ferme les yeux d'ivresse, son cœur va éclater de bonheur ...Il tombe.

Il rêvait, Icare. " Tu rêves, mon fils! " lui criait peut-être Dédale depuis longtemps. Et au plus fort de son rêve, porté au plus haut par son désir, la réalité le fait lâcher prise et tomber. Chute atroce sur un sol sans pitié. Sa réalité à lui a nom " soleil ", son sol s'appelle " mer ". Icare s'enfonce dans une gerbe blanche. Et la mer est sa mort.

 

Phaéton et le char d'Hélios

PhaétonPhaéton est le fils d'Hélios, le Soleil. Mais il vit sur la terre parce que sa mère est une mortelle, et quand il dit qu'il est le fils du Soleil, personne ne le croit. Un jour, il en a assez. Il veut voir de ses yeux son très fameux père, c'est-à-dire le voir de près, dans toute sa simplicité. Phaéton se rend à pied chez Hélios. Au palais d'Hélios, il n'y a qu'une seule heure, midi. Le crépuscule n'ombre jamais les murs ,La nuit n'existe pas. Merveille que ce palais! Eblouissement !

L'or brille si fort, l'ivoire étincelle si puissamment, les joyaux rutilent de tant de feux que Phaéton se cache les yeux et recule... Pour un peu, il ferait demi-tour, quand une voix de tonnerre se fait entendre: " Tu es là, Phaéton! Que veux tu ? " A ces mots, Phaéton tressaille d'émotion, de crainte, mais aussi d'orgueil. Ce tonnerre, c'est son père! Le Soleil en personne! Alors, dans l'éblouissement orangé de ses paupières fermées, Phaéton ose demander: " Es-tu bien mon père ". Hélios part d'un grand rire et puis il dit: " Veux tu une preuve ? Exprime un souhait, je te l'accorde! " Osera-t-il, Phaéton, en cet instant, dire tout haut l'incroyable pensée qui l'assaille, le souhait insensé qui le saisit tout entier ? Il ose, il le murmure : " Mon père, laisse-moi, pour un jour seulement, conduire ton char à travers le ciel! "

Le Soleil a, si l'on peut dire, un haut-le-corps... Il ne s'attendait pas vraiment à cette demande, et pour dire la vérité, il est plutôt ennuyé. Mais il a promis... Et il faut se décider vite. Le temps presse, le temps piaffe, les chevaux hennissent. Déjà les portes de l'Est s'empourprent. L'Aurore arrive, i faut partir. Phaéton saute sur le char , prend les longues rênes, heureux et fier. Il va leur montrer, sur la terre... Et les chevaux s'élancent dans le ciel, tellement rapides que bientôt leurs sabots foulent les derniers nuages de la nuit. Et le char monte, monte. Phaéton est ivre d'air, de gloire, de vitesse, de puissance. Il conduit le char du Soleil! Il se croit le maître du jour !

Mais soudain, tout bascule. Les chevaux s'emportent, ils accélèrent, prennent le mors aux dents et s'écartent de leur course habituelle. Ils ont reconnu que la main qui les conduit n'est pas celle de leur Maître et ils n'obéissent plus à Phaéton. Et voilà le char qui déraille, qui bondit à travers le ciel, heurte la constellation du Cancer , évite de justesse la collision avec le Lion, bouscule la Vierge... Phaéton s'affole, s'affale sur le siège, paralysé de terreur. C'est le signal d'une course encore plus folle. Cette fois, les chevaux plongent vers la terre, ils touchent presque les montagnes, de leurs sabots de feu. Et les plaines s'embrasent, les vallées ne sont plus qu'une buée. Bientôt, les forêts sont en flammes, le char du Soleil glisse comme un traîneau fou juste au dessus
de la terre qui se transforme en brasier .

La Terre-Mère pousse un long cri de détresse. Zeus en a assez vu. Il faut faire vite. Il saisit sa foudre et la jette sur Phaéton, pauvre conducteur étourdi et repentant... Il le tue, fracassant le char et précipitant les chevaux affolés dans la mer. Tout en feu, Phaéton tombe à travers l'espace jusqu'à la terre.

 

Pégase et Bellérophon

Au moment où commence cette histoire, Bellérophon n'a eu que des malheurs. Il a dû quitter sa ville natale, Corinthe, parce qu'il y avait tué successivement son meilleur ami et son frère. S'étant réfugié auprès de Proetos, roi de Tirynthe, une nouvelle malchance s'abat sur lui: la femme de Proetos tombe amoureuse de lui. Fou de rage, Proetos envoie Bellérophon chez Iobates, avec ordre de tuer la terrible Chimère...

La Chimère est un monstre épouvantable à tête de lion, à corps de chèvre et à queue de dragon et qui souffle le feu. Avant d'entreprendre cette tâche, Bellérophon consulte un devin qui lui dit : " Ta seule chance, c'est Pégase! " Pégase, le merveilleux coursier ailé! Pégase est d'un blanc de lait, ses sabots sont si fins qu'on dirait des croissants de lune, et il a deux ailes prodigieuses, qui lui permettent de sillonner le ciel. Capturer Pégase, le cheval indomptable, Bellérophon le veut et le fera.

Dans la nuit, Athéna lui apparaît en songe, elle lui tend un mors en or, un mors magique, il réussira. Bellérophon trouve le cheval en train de boire à une source sur l'Acropole de Corinthe. Il s'approche. Le cheval ne bouge pas. Il tourne sa belle tête blanche vers Bellérophon, entrouvre sa bouche pour laisser glisser le mors. Le charme d'Athéna opère. Bellérophon est maître de cette pure merveille. Et les voilà qui s'envolent, magnifiques dans l'azur .I1s arrivent à la Chimère qui crache tout son feu mais ne les atteint pas. Bellérophon crible la Chimère de mille flèches, puis il fonce sur elle et lui enfonce entre les mâchoires un morceau de plomb qu'il a fixé à la pointe de sa lance. Le souffle de feu de la Chimère fait fondre le plomb qui coule dans l'horrible bête.

Bellérophon aurait pu se contenter de cette gloire. Mais non, les hommes veulent toujours aller plus loin. Bellérophon a voulu garder Pégase pour lui et monter vers l'Olympe comme les dieux immortels! Pour le punir de son insolence, Zeus envoie un taon monstrueux qui pique cruellement le pauvre Pé9ase. Pégase rue de douleur et Bellérophon est précipité à terre où il se ramasse durement dans un buisson d'épines. L'histoire se finit ainsi, sans monture, sans panache. Maintenant, Bellérophon erre tristement... A pied.

 

Prométhée, le Titan

Prométhée par Gustave Moreau

Vision romantico-héroïque de Prométhée, par Gustave Moreau (ici, l'oiseau est un vautour)

Prométhée, qui était de la race des Titans, a toujours été considéré comme l'ami du genre humain et parfois même son créateur. Habile et ingénieux, il lui a enseigné les sciences et les arts utiles. Son nom signifie "celui pense avant d'agir", et cette prévoyance lui a permis d'éviter, à lui comme à Zeus ou à se propres enfants, bien des déboires, mais pas de les empêcher, ni d'encourir la colère de Zeus... colère qui finit par se calmer.

Si la figure héroïque de Prométhée, qui se dresse avec courage devant Zeus pour le bien de l'humanité, s'est popularisée et reste vivace, le fait de nous plonger dans les mythes concernant ce héros nous a fait trébucher à chaque pas sur des versions diverses et souvent contradictoires. Là, comme souvent dans la mythologie grecque, on devine une trame ancienne (qui pourrait avoir une base "historique", réelle, pourquoi pas ?) qui aurait donné lieu à toutes sortes de broderies et de rapiéçages... Plus sérieusement, on découvre dans cette légende, avec une certaine excitation, de nombreux points communs avec la Bible.

La légende de Prométhée se situe pour une large part dans le Cacause. Cette chaîne de montagne, qui s'étend de la Mer Noire à la Mer Caspienne, sépare l'Europe (au Nord) de l'Asie (au Sud), la Colchide (au Sud) de la Scythie (au Nord), l'actuelle Tchétchénie.

Prométhée le Titan

Ignoré par Homère (ni l'Iliade, ni l'Odyssée, ni le Hymnes n'en font mention), Prométhée est largement évoqué par Hésiode, le premier, dans sa Théogonie.

Selon Hésiode, Prométhée était fils du Titan Japet et l'Océanide Clyméné (il appartenait donc à la seconde génération des Titans, et était cousin germain de Zeus). Selon Eschyle (6e et 5e s. av. J.-C.), la mère de Prométhée serait la Titanide Thémis, qui sera par la suite seconde épouse de Zeus, mère des Heures et des Moires (ou Parques, en latin). Selon d'autres légendes, plus tardives, il est considéré soit comme un fils d'Ouranos et de Gaïa (ce qui fait qu'il appartiendrait à la première génération de Titans, et qu'il serait frère de Cronos et de Rhéa, père et mère de Zeus), soit, comme le raconte Apollodore dans sa Bibliothèque, le fils du Titan Japet et de l'Océanide Asia, et donc soeur de Clyméné. Une légende étrange, et dont on ne retrouve qu'un seul écho dans la littérature (en fait, dans des commentaires tardifs de l'Iliade), ferait de Prométhée le fils d'Héra, rendue enceinte suite au viol par le géant Eurymédon alors qu'elle été enfant. Le nom de Japet, père de Prométhée, évoque fortement le nom d'un des trois fils de Noé, Japhet. Et cela n'est pas le premier point commun avec l'histoire de Noé !

Revenons à Hésiode, qui décrit ensuite les frères de Prométhée :

- Atlas "plein d'esprit de puissance", que l'on connaît plutôt sous les terme de "géant Atlas", qui fut condamné par Zeus à porter sur ses épaules la voûte céleste,

- "l'insolent Ménoetios", qui fut foudroyé par Zeus et envoyé dans le Tartare "en raison de sa folle présomption et de son courage plus que redoutable",

- Épiméthée, qui était l'opposé de Prométhée et qui fut "dès le commmencement un malheur pour les hommes mangeurs de pain". Pourquoi un malheur ? C'est ce qu'Hésiode nous racontera , car il épousa Pandore, la première femme, créature forgée par Zeus pour se venger de l'humanité. Cet épisode, nommé "histoire de la boîte de Pandore", est également racontée, toujours par Hésiode, dans un autre de ses poèmes, Les Travaux et les Jours.

Quant au destin de Prométhée, Hésiode rapporte ensuite le supplice de Prométhée et la manière dont il fut libéré.

L'Histoire de Prométhée chez Hésiode : la Part des dieux, le Vol du Feu et la Boîte de Pandore

Hésiode, dans sa Théogonie, rapporte épisodes de la vie de Prométhée :

- comment, par ruse, il régla le partage de la viande entre sacrifices pour les dieux et nourriture pour les humains, au bénéfice de ces derniers, et comment il irrita Zeus pour la première fois,

- comment Zeus refusa de donner le feu aux hommes et comment Prométhée le lui déroba, "au creux d'une férule" (ou d'un fenouil),

- comment Zeus, irrité au plus haut point, se vengea en créant la première femme, Pandore, parée de toutes les beautés et de tous les charmes, et comment elle ouvrit la jarre où étaient enfermés les malheurs qui touchèrent alors l'humanité.

Voici le texte d'Hésiode :

" C'était aux temps où se réglait la querelle entre les dieux et les mortels, à Mécôné. Ce jour-là, Prométhée avait partagé, de bon coeur, un boeuf énorme, qu'il avait ensuite placé devant tous. Il cherchait à tromper Zeus : pour l'une des deux parts, il avait mis sous la peau les chairs et les entrailles riches et grasse, puis caché le tout dans la panse du boeuf ; pour l'autre, il avait, par un artifice rusé, disposé en un tas les os nus de la bête et les avait recouverts de graisse blanche. Sur quoi, le père des dieux et des hommes lui dit : " O fils de Japet, noble seigneur entre tous, tu as usé de partialité, bel ami, dans le partage des parts. "

Ainsi, railleur, parlait Zeus aux desseins éternels. Et Prométhée aux idées retorses lui répondit avec un léger sourire, méditant sa ruse: " Zeus très grand, le plus glorieux des dieux immortels, choisis donc de ces parts celle que ton coeur te montre, en ta poitrine ".

Voilà ce qu'il dit, n'ayant en tête que son projet rusé, et Zeus aux desseins éternels comprit la ruse et sut la reconnaître. Mais déjà en son coeur, il méditait la ruine des mortels, tout comme en fait il devait l'achever. De ses deux mains il souleva la graisse blanche, et la colère emplit son âme, tandis que la bile montait à son coeur, à la vue des os nus de la bête, révélant la ruse . — Et aussi bien est-ce pourquoi, sur la terre, les fils des hommes brûlent aux Immortels les os nus des victimes sur les autels odorants — Et, indigné, l'assembleur de nuées, Zeus, dit : " Ah ! fils de Japet, qui en sais plus que nul au monde, je le vois, bel ami, tu n'as pas oublié la ruse."

Ainsi, irrité, parlait Zeus aux conseils éternels ; et, dès lors, de cette ruse gardant toujours le souvenir, il se refusait à diriger sur les frênes l'élan du feu infatigale pour le profit des mortels, habitants de cette terre. Mais le brave fils de Japet sut le tromper et déroba, au creux d'une férule, l'éclatante lueur du feu infatigable ; et Zeus, qui gronde dans les nues, fut mordu profondément au coeur et s'irrita en son âme, quand il vit briller au milieu des hommes l'éclatante lueur du feu. Aussitôt, en place du feu, il créa un mal, destiné aux humains. Avec de la terre, l'illustre Boiteux modela un être tout pareil à une chaste vierge, par le vouloir du fils de Cronos. La déesse aux yeux pers, Athéna, lui noua sa ceinture, après l'avoir parée d'une robe blanche, tandis que ses mains faisaient tomber de son front un voile aux mille broderies, merveille pour les yeux. Autour de sa tête elle posa un diadème d'or forgé par l'illustre Boiteux lui-même, de ses mains adroites, pour plaire à Zeus son père : il portait d'innombrables ciselures, merveille pour les yeux, images des bêtes que par milliers nourrissent la terre et les mers ; Héphaistos en avait mis des milliers — et un charme indéfini illuminait le bijou — véritables merveilles, toutes semblables à des êtres vivants.

Et quand, en place d'un bien, Zeus eut créé ce mal si beau, il l'amena où étaient dieux et hommes, superbement paré par la Vierge aux yeux pers, la fille du dieu fort ; et les dieux immortels et les hommes mortels allaient s'émerveillant à la vue de ce piège, profond et sans issue, destiné aux humains. Car c'est de celle-là qu'est sortie la race, l'engeance maudite des femmes, terrible fléau installé au milieu des hommes mortels. Elles ne s'accomodent pas de la pauvreté odieuse, mais de la seule abondance. Ainsi, dans les abris où nichent les essaims, les abeilles nourrissent les frelons que partout suivent oeuvres de mal. Tandis qu'elles, sans repos, jusqu'au coucher du Soleil, s'empressent chaque jour à former des rayons de cire blanche, ils demeurent, eux, à l'abri des ruches et engrangent dans leur ventre le fruit des peines d'autrui. Tout de même, Zeus qui gronde dans les nues, pour le grand malheur des hommes mortels, a créé les femmes, que partout suivent oeuvres d'angoisse, et leur a, en place d'un bien, fourni tout au contraire un mal. Celui qui, fuyant, avec le mariage, les oeuvres de souci qu'apportent les femmes, refuse de se marier, et qui, lorsqu'il atteint la vieillesse maudite, n'a pas d'appui pour ses vieux jours, celui-là sans doute ne voit pas le pain lui manquer, tant qu'il vit, mais, dès qu'il meurt, son bien est partagé entre collatéraux. Et celui, en revanche, qui dans son lot trouve le mariage, peut rencontrer sans doute une bonne épouse, de sain jugement ; mais, même alors, il voit toute sa vie le mal compenser le bien ; et, s'il tombe sur une espèce folle, alors, sa vie durant, il porte en sa poitrine un chagrin qui ne quitte plus son âme ni son coeur, et son mal est sans remède.

Ainsi il n'est pas facile de se dérober ni de se soustraire au vouloir de Zeus. Le fils de Japet lui-même, le bienfaisant Prométhée, n'a pas échappé à sa grande colère, et, malgré tout son savoir, la contrainte d'un lien terrible le tient."

Cette femme parfaite qui fut à l'origine des maux de l'humanité est Pandore. Hésiode revient sur le mythe de Pandore dans l'un de ses autres poèmes, Les Travaux et les Jours (voir notre page consacrée à Pandore).

Prométhée le Prévoyant

Soit par intelligence, soit qu'il eût des capacités de devin, Prométhée donna à son entourage de nombreux bons conseils.

Selon Hésiode, il enjoignit son frère Epiméthée de refuser tout cadeau que Zeus lui ferait. Mais le frère étourdi e put résister à la beauté de Pandore.

Eschyle rapporte que, averti par sa mère Thémis de l'oracle de Gaïa, selon lequel toute lutte entre Zeus et les Titans s'achèverait par un désastre pour ces derniers, il déconseilla, d'abord, aux Titans de s'opposer à Zeus, puis à ce dernier d'enfermer les Titans au Tartare.

Selon Apollodore, il déconseilla à Zeus d'épouser Thétis, la plus belle des Néreidies, qu'il se disputa à Poséidon et pour laquelle il s'était pris d'une grande passion. En effet, Prométhée avait appris que le fils que la Néréide mettrait au monde deviendrait roi du Ciel.

Il donna aussi à Héraclès de précieux conseils, comme on le verra.

Le Créateur de l'Homme et l'ami d'Athéna

L'ingénieux, le prévoyant, l'habile Prométhée désespérait qu'aucune des créatures de la Terre ne partageait ses qualités. Avec l'aide d' Athéna, il modela une figure d'argile, à l'image des dieux, faite de terre et d'eau, à Panopée en Phocide (région située au Nord du Golfe de Corynthe). Athéna lui insufla la vie, et ce fut l'Homme. Comme dans la Bible, l'homme est créé à partir de la terre. Pausanias, dans le livre X de sa Description de la Grèce, affirme que l'on pouvait encore voir, à son époque, devant une chapelle de Panopée dédiée à Prométhée, un peu de l'argile qui servit à façonner le premier humain.

Fait d'eau et de terre par Prométhée, porté à la vie par l'air du souffle d'Athéna, l'Homme n'avait plus guère besoin que du feu, et c'est Prométhée qui le lui a apporté. Il lui donna le feu à l'insu de Zeus, l'ayant dérobé dans une tige de férule (ou de fenouil). Les quatre éléments étaient là pour constituer l'espèce humaine.

Prométhée, qui était là lorsqu'Athéna naquit de la tête de Zeus (selon certains, c'est Prométhée qui fendit la tête de Zeus pour en laisser sortir la déesse), avait beaucoup d'affinités avec la déesse qui lui enseigna toutes sortes de sciences et d'arts utiles. Prométhée, à son tour, les enseigna aux humains.

Eschyle, l'un des plus grands tragédiens grecs, a consacré une pièce, son Prométhée enchaîné, au Titan. C'est dans ce texte que sont exposés tous les bienfaits accomplis par Prométhée à l'égard de l'humanité.

" Aussitôt assis sur le trône paternel, sans retard, il répartit les divers privilèges entre les divers dieux et commence à fixer les rangs dans son empire. Mais aux malheureux mortels, pas un moment il ne songea. Il en voulait au contraire anéantir la race, afin d’en créer une toute nouvelle. A ce projet nul ne s’opposait, que moi. Seul, j’ai eu cette audace ; j’ai libéré les hommes et fait qu’ils ne sont pas descendus, écrasés, dans l’Hadès... "

Eschyle décrit ensuite, par la bouche de Prométhée, comment les hommes, sans arts ni sans sciences :

"...voyaient sans voir, écoutaient sans entendre. Pareils aux fantômes des songes, ils vivaient leur longue existence dans le désordre et la confusion. Ils ne savaient se servir ni de briques ni de charpente pour construire des maisons éclairées par le soleil. Et, cachés sous terre, ils habitaient, comme l'agile fourmi les retraites profondes de leurs antres obscurs. Nul signe certain ne leur faisait distinguer l'hiver, ni le printemps fleuri, ni l'été des moissons, ni l'automne des fruits. Sans réflexion ils faisaient tout au hasard, jusqu'au moment où je leur fis observer le lever des astres, et leur coucher, plus difficile encore à connaître. Pour eux, je fis la plus belle découverte, celle des nombres ; j'ai trouvé la combinaison des lettres et l'usage de la mémoire, mère des muses créatrices de tous les arts. C'est moi qui le premier ai soumis au joug le boeuf sauvage, afin qu'il fût esclave et que, par la force de son corps, il succédât aux hommes, dans leurs plus pénibles travaux. Par moi les coursiers dociles au frein ont été attelés aux chars, ornement du luxe que permet une richesse démesurée. Nul autre que moi n'a inventé ces voitures aux ailes de lin qui parcourent les mers... Avant moi, et c'est ici mon bienfait le plus grand, étaient-ils attaqués de quelque maladie, nul remède pour eux, ni aliment, ni huile pour leur corps, ni boisson. Il dépérissaient faute de remède, avant que je leur eusse enseigné ces compositions salutaires qui les préservent de tous les maux. J'ai réglé les différents genres de divination. Le premier j'ai distingué, pari les songes, les visions véritables, expliqué les pronostics difficiles, et les présages qu'on rencontre en chemin... Ce n'est pas tout : ces biens utiles, cachés dans la terre, l'airain, le fer, l'argent et l'or, qui se vantera de les avoir découverts avant moi ?.. En un mot, sache que les humains doivent tous les arts à Prométhée."

Selon Platon (Protagoras), si les humains étaient comme "les fantômes des songes", c'est que, au moment du partage des qualités entre les différentes espèces vivantes qui peuplaient la terre, ce fut Epiméthée qui s'occupa de ce partage : il pourvut si bien les animaux qu'il ne resta plus rien pour l'homme.

On comprend encore mieux cette symbolique du feu. On peut associer aux quatre éléments des "constituants" de l'être humain : la terre est le corps matériel, l'eau est l'énergie vitale figurée par les fluides qui parcourent le corps et l'air est la pensée. Le feu, ici, représente une forme supérieure de pensée (l'éclair qui traversa Einstein quand il reçut l'étincelle de la Théorie de la relativité ?). C'est aussi cela que Prométhée a apporté aux hommes, pas seulement l'outil qui leur permettait de faire fuir les bêtes sauvages, de cuire les aliments et de forger les métaux.

Le Supplice de Prométhée

Pour avoir donné le feu à l'Homme, Prométhée fut condamné par Zeus à être enchaîné sur le Caucase (Hésiode, quant à lui, ne parle pas du Caucase, mais seulement d'une "colonne"). Eschyle, dans son Prométhée enchaîné, s'étend sur les raisons multiples et retorses qui ont poussé Zeus à châtier cruellement le Titan. Il ne s'agissait pas seulement du feu, à proprement parler, mais du "feu céleste", le "maître dont ils apprendront bien des arts".

C'est Héphaïstos, le dieu forgeron, qui cloua Prométhée. Il y demeura, comme le raconte Apollodore, "un grand nombre d'années, et un aigle venait chaque jour lui manger le foie, qui renaissait pendant la nuit." C'est Héraclès qui délivra Prométhée de son supplice, après avoir tué l'aigle d'un coup de flèche.

Du sang des blessures de Prométhée naquit le crocus du Caucase (pour la petite histoire, c'est du pistil d'une espèce de crocus que l'on tire le safran), comme la mandragore pousse au pied des gibets. Et c'est de ce crocus que Médée tira un suc dont elle donna une fiole à Jason lorsqu'il lui promit de l'épouser : il s'en enduisit le corps et put ainsi mettre sous le joug deux taureaux furieux, dont les naseaux crachaient des flammes, labourer les champs d'Arès, y semer des dents de dragon et réduire à néant l'armée qui en sortit. Ayant accomplit cet exploit, il reçut la Toison d'or des mains du roi Aeétès.

Prométhée et Héraclès : Chiron et l'immortalité de Prométhée, les Pommes d'or et sa délivrance

Dans la Bibliothèque d'Apollodore, recueil tardif, mais l'une des plus abondantes sources de Mythes grecs, on retrouve Prométhée dans la légende du héros Héraclès, au cours de deux de ses douze travaux.

Lorsque le héros chassa le sanglier d'Erymanthe, il blessa de sa flèche, par erreur, le Centaure Chiron qu'il toucha au genou. Chiron, qui connaissait pourtant bien des remèdes - il avait enseigné la médecine au fils d'Apollon qui allait devenir le dieu de la médecine, Asclépios - ne put guérir de cette blessure faite par une flèche trempée dans le sang du monstre qu'était l'Hydre de Lerne et qu'Héraclès avait vaincue. Or, Chiron était immortel : il était donc condamné à souffrir pendant toute l'éternité à venir. Que ce fut de douleur ou par lassitude après une longue vie, il exprima son désir d'échanger son immortalité contre le repos éternel. Prométhée, qui, bien que Titan, était mortel, se proposa. Zeus y consentit. Ainsi, Chiron, autre bienfaiteur de l'humanité, quitta cette terre.

Quant au second épisode où interviennent conjoitement Héraclès et Prométhee, il s'agit du onzième des Douze Travaux d'Héraclès (ou Hercule, selon la prononciation latine), la quête des Pommes d'or du jardin des Hespérides.

Ces pommes d'or étaient le cadeau de noces offert par Gaïa à Zeus et à Héra. Elles étaient gardées par Ladon, le dragon immortel fils de Typhon et d'Echidna, et par les quatre Nymphes des Hespérides, Aglaé, Érythie, Héspérie et Aréthuse. Il avait appris de Nérée que le jardin se trouvait en Lybie, Héraclès parcourut cette région, mais ne les y trouva pas. Il se dirigea alors vers l'Est, traversant l'Egypte, l'Arabie, traversant la mer pour atteindre le Caucase, tout en trouvant sur son chemin de nombreuses aventures.

Arrivé dans le Caucase, il tua d'un coup de flèche l'aigle qui torturait Prométhée et libéra le Titan. C'est ici que se place l'épisode de l'échange de l'immortalité entre Chiron et Prométhée. Héraclès fut leur messager auprès de Zeus. Ainsi, après le supplice, Prométhée devint immortel.

En remerciement, Prométhée indiqua à Héraclès que le Jardin se trouvait au pays des Hyperboréens et lui donna deux conseils. D'abord, de ne pas cueillir les pommes de ses mains, mais de proposer à Atlas de le soulager du poids du ciel, et de l’envoyer cueillir les pommes à sa place. Ensuite, de rendre à Atlas sa charger au plus vite, dès qu'il aurait obtenu les pommes, parce qu'Atlas ne voudrait lus reprendre sa charge.

Arrivé au pays des Hyperboréens, le héros rencontra Atlas, qui fut trop heureux de se décharger un moment du poids énorme du ciel. Atlas posa le ciel sur le épaules du héros et partit cueillir trois pommes d'or, mais, conformément à ce qu'avait dit Pométhée, Atlas ne voulut plus reprendre sa charge. Alors, par ruse, Héraclès lui demanda de la reprendre juste un moment, le temps de se mettre sur la tête un bandeau qui l'aiderait à supporter ce poids. Atlas, dans sa naïveté, posa les pommes à terre et accepta de soutenir le ciel un moment encore : Héraclès s’empara des pommes et s’enfuit.

Les enfants de Prométhée et le déluge de Deucalion

Selon Apollodore, Prométhée eut pour fils Deucalion, roi de Phthiotide (région de Phthie ou Phtia en Thessalie, l'actuelle Lamia), qui épousa sa cousine Pyrrha, fille d'Epiméthée et de Pandore. Ils furent les survivants d'un déluge qu'envoya Zeus pour détruire l'espèce humaine.

Deucalion eut pour fils Hellen, ancêtre légendaire du peuple grec (en grec, "Grèce" se dit "Hellas").

Qu'il fut le "créateur" de l'espèce humaine ou le "père" du peuple grec, Prométhée s'est opposé à Zeus dans ses désirs de perdre l'humanité. Cadeau empoisonnée, déluge, privation... Ce rôle d'opposant à l'"autorité divine supérieure" et de "porteur de feu" le rapproche de Lucifer (qui signifie littéralement "porteur de lumière") ou de Satan. Et, sous d'apparentes similitudes, c'est un gouffre philosophique qui sépare donc les traditions méditerranéennes des traditions sémitiques, qui font de cette lumière un mal pour l'humanité, et Lucifer-Satan un être détestable. De même que la consommation du fruit de l'arbre de la "connaissance du bien et du mal" (si désirable en lui-même) est interdite dans le jardin d'Eden..

Pandore et la boîte

 ... cette fameuse "boîte" qui est en réalité jarre ?

Liée à l'histoire de Prométhée, d'Épiméthée, de la création de l'homme et du déluge, l'histoire de Pandore est l'une des plus "accrocheuses" de la Mythologie grecque. Créature féminine idéale, parée de toutes les beautés et de tous les charmes, elle est l'Éve grecque. Mais son caractère fatal la rend beaucoup plus proche d'un autre archétype talmudique, la belle et terrible Lilith. Salomé, Loulou (ou Lulu), Lola-Lola de l'Ange Bleu et les "femmes fatales" du cinéma des années 20 et 30, tels en sont les avatars moderne d'un des plus vieux mythes de l'humanité.

Le nom de Pandore signifie "tous les dons" : beauté, grâce, persuasion, habilité manuelle... mais aussi mensonge et fourberie, tel fut le lot de Pandore.

De nombreux poètes, plus ou moins tardivement, ont cité Pandore, mais l'origine du mythe est à rechercher chez le plus ancien des mythographes, Hésiode. Homère, lui, ignore Pandore.

Hésiode

Le premier à mentionner le mythe de Pandore est Hésiode, dans deux de ses poèmes. Pandore, selon lui, était une créature créée par Zeus, pour le malheur des humains après que Prométhée leur eut donné le feu.

Voici le texte d'Hésiode, extrait de sa Théogonie :

" Aussitôt, en place du feu, [Zeus] créa un mal, destiné aux humains. Avec de la terre, l'illustre Boiteux modela un être tout pareil à une chaste vierge, par le vouloir du fils de Cronos. La déesse aux yeux clairs, Athéna, lui noua sa ceinture, après l'avoir parée d'une robe blanche, tandis que ses mains faisaient tomber de son front un voile aux mille broderies, merveille pour les yeux. Autour de sa tête elle posa un diadème d'or forgé par l'illustre Boiteux lui-même, de ses mains adroites, pour plaire à Zeus son père : il portait d'innombrables ciselures, merveille pour les yeux, images des bêtes que par milliers nourrissent la terre et les mers ; Héphaïstos en avait mis des milliers — et un charme indéfini illuminait le bijou — véritables merveilles, toutes semblables à des êtres vivants.

Et quand, en place d'un bien, Zeus eut créé ce mal si beau, il l'amena où étaient dieux et hommes, superbement paré par la Vierge aux yeux pers, la fille du dieu fort ; et les dieux immortels et les hommes mortels allaient s'émerveillant à la vue de ce piège, profond et sans issue, destiné aux humains. Car c'est de celle-là qu'est sortie la race, l'engeance maudite des femmes, terrible fléau installé au milieu des hommes mortels. Elles ne s'accomodent pas de la pauvreté odieuse, mais de la seule abondance. Ainsi, dans les abris où nichent les essaims, les abeilles nourrissent les frelons que partout suivent oeuvres de mal. Tandis qu'elles, sans repos, jusqu'au coucher du Soleil, s'empressent chaque jour à former des rayons de cire blanche, ils demeurent, eux, à l'abri des ruches et engrangent dans leur ventre le fruit des peines d'autrui. Tout de même, Zeus qui gronde dans les nues, pour le grand malheur des hommes mortels, a créé les femmes, que partout suivent oeuvres d'angoisse, et leur a, en place d'un bien, fourni tout au contraire un mal. Celui qui, fuyant, avec le mariage, les oeuvres de souci qu'apportent les femmes, refuse de se marier, et qui, lorsqu'il atteint la vieillesse maudite, n'a pas d'appui pour ses vieux jours, celui-là sans doute ne voit pas le pain lui manquer, tant qu'il vit, mais, dès qu'il meurt, son bien est partagé entre collatéraux. Et celui, en revanche, qui dans son lot trouve le mariage, peut rencontrer sans doute une bonne épouse, de sain jugement ; mais, même alors, il voit toute sa vie le mal compenser le bien ; et, s'il tombe sur une espèce folle, alors, sa vie durant, il porte en sa poitrine un chagrin qui ne quitte plus son âme ni son coeur, et son mal est sans remède. "

Note : l'illustre Boiteux est le dieu Héphaïstos, le dieu forgeron à l'habilité sans pareille ; le fils de Cronos (ou "Cronide", comme dans l'extrait suivant) est, bien sûr, Zeus.

Ainsi, Hésiode, qui fut, semble-t-il, un homme plutôt amer, considérait-t-il que la seule existence des femmes est une plaie pour l'humanité... La "boîte" est évoquée dans un autre poème, Les Travaux et les Jours. Voici l'extrait de ce poème :

" Il dit, et tous obéissent au seigneur Zeus, fils de Cronos. En hâte, l'illustre Boiteux modèle dans la terre la forme d'une chaste vierge, selon le vouloir du Cronide. La déesse aux yeux pers, Athéné, la pare et lui noue sa ceinture. Autour de son cou les Grâces divines, l'auguste Persuasion mettent des colliers d'or ; tout autour d'elle les Heures aux beaux cheveux disposent en guirlandes des fleurs printanières. Pallas Athéné ajuste sur son corps toute sa parure. Et, dans son sein, Le Messager, tueur d'Argos, crée mensonges, mots trompeurs, coeur artificieux, ainsi que le veut Zeus aux lourds grondements. Puis, héraut des dieux, il met en elle la parole et à cette femme il donne le nom de "Pandore", parce que ce sont tous les habitants de l'Olympe qui, avec ce présent , font présent du malheur aux hommes qui mangent le pain.

Son piège ainsi creusé, aux bords abrupts et sans issue, le Père des dieux dépêche à Épiméthée, avec le présent des dieux, l'illustre Tueur d'Argos, rapide messager. Épiméthée ne songe point à ce que lui a dit Prométhée : que jamais il n'accepte un présent de Zeus Olympien, mais le renvoie à qui l'envoie, s'il veut épargner un malheur aux mortels. Il accepte et, quand il subit son malheur, comprend.

La race humaine vivait auparavant sur la terre à l'écart et à l'abri des peines, de la dure fatigue, des maladies douloureuses, qui apportent le trépas aux hommes. Mais la femme, enlevant de ses mains le large couvercle de la jarre, les dispersa par le monde et prépara aux hommes de tristes soucis. Seul, l'Espoir restait là, à l'intérieur de son infrangible prison, sans passer les lèvres de la jarre, et ne s'envola pas au dehors, car Pandore déjà avait replacé le couvercle, par le vouloir de Zeus, assembleur de nuées, qui porte l'égide. Mais des tristesses en revanche errent innombrables au milieu des hommes : la terre est plein de maux, la mer en est pleine ! Les maladies, les unes de jour, les autres de nuit, à leur guise, visitent les hommes, apportant la souffrance aux mortels — en silence, car le sage Zeus leur a refusé la parole. Ainsi donc il n'est nul moyen d'échapper aux dessins de Zeus. "

Cette version du mythe est tout juste une peu moins misogyne : Pandore est à l'origine des maux de l'humanité, non par sa seule présence, mais parce qu'elle a libéré de la jarre les maux et les souffrances. Seul l'Espoir est resté dans la jarre...

D'après le "pseudo"-Apollodore, l'auteur de la Bibliothèque, Pandore devint l'épouse d'Épiméthée et mère de Pyrrha qui, avec son cousin Deucalion, échappa au déluge et devint la mère de l'humanité.

Le mythe de Sisyphe

Sisyphe

Sisyphe faisant rouler son rocher.

" Et je vis Sisyphe qui souffrait de grandes douleurs et poussait un énorme rocher avec ses deux mains. Et il s'efforçait, poussant ce rocher des mains et des pieds jusqu'au sommet d'une montagne. Et quand il était près d'en atteindre le faîte, alors la masse l'entraînait, et l'immense rocher roulait jusqu'au bas. Et il recommençait de nouveau, et la sueur coulait de ses membres, et la poussière s'élevait au-dessus de sa tête. "

Ainsi Homère décrit-il le supplice de Sisyphe, condamné à faire rouler une énorme pierre jusqu'en haut d'une montagne, et encore et toujours, indéfiniment.

Ce supplice éveille des échos dans notre monde moderne : il semble que nous tous soyons condamnés à accomplir des tâches et à les reproduire indéfiniment, pour le seul besoin d'accomplir ces tâches.

Un descendant de Prométhée et de Deucalion

L'un des enfants Deucalion, fils de Prométhée, épousa Pyrrha, sa cousine, fille d'Epiméthée et de Pandore. Après avoir survécu au plus célèbre déluge de la Mythologie grecque, ils eurent plusieurs enfants. Parmi eux fut Hellen, père éponyme du peuple grec (le nom grec de la Grèce est "Hellas"), dont Éole, père de Sisyphe.

Sisyphe

Sisyphe bâtit la ville d'Éphyre (qui devint Corynthe) et épousa la Pléiade (fille du Titan Atlas et de l'Océanide Pléioné) Méropé, qui en conçut une grande honte, parce qu'elle était la seule parmi les Pléiades à avoir épousé un mortel. Pourtant, Sisyphe, d'après Homère, était le plus sage des mortels : il régnait sur la ville de Corynthe et réussit à enchaîner la Mort. Il la retint jusqu'à ce qu'Hadès, dieu des Enfers, envoya Arès, dieu de la Guerre, délivrer la "noire Mort". Homère explique que, pour lier la Mort, Sisyphe se contentait d'éviter la guerre et vivre en bonne intelligence avec ses voisins.

Lorsque Zeus, encore pris par ses aventures amoureuses, enleva Égine, le père de cette dernière, le dieu-fleuve Asopos, demanda à Sisyphe (d'autres disent que ce fut à Tantale, un supplicié du Tartare) où elle se trouvait. Sisyphe, qui avait hérité de Prométhée le courage de s'opposer à Zeus et suivre sa conscience, le lui apprit, et Asopos se détourna de son cours pour arroser Corynthe.

D'autres mythographes font un portrait moins élogieux de Sisyphe, et le montrent séduisant sa nièce Tyro, fille de Salmonée, ou commettant toutes sortes de brigandages et rompant les lois de l'hospitalité pour tuer les voyageurs qui tombaient entre ses mains.

Lorsque Thésée, roi d'Athènes, le tua au combat au cours d'une guerre qui opposa les deux villes voisines, Athènes et Corynthe, il fut envoyé aux Enfers, où il était condamné à rouler indéfiniment une énorme roche ronde jusqu'en haut d'une montagne. Parvenue au sommet, la roche, sous l'effet de la gravité, redescendait jusqu'au pied de la montagne, et Sisyphe devait recommencer sa harassante tâche.

L'un des descendant de Sisyphe, Glaucos, se distingua au cours de la guerre de Troie. Il combattit du côté des Troyens, et fut tué par Ajax

La belle Hélène, héroïne d'épopée

Qu'on la nomme "belle Hélène", "Hélène de Troie", "Hélène de Sparte", "Hélène d'Egypte", "fille de Léda" ou "la plus belle femme du monde", c'est toujours à la protégée d'Aphrodite et à la fille spirituelle de Pandore que l'on se réfère. Son histoire, qui fascina poètes, historiens de l'Antiquité et mythographes, est une épopée de femme. Que personne n'a jamais racontée dans sa totalité.

Le dessin

Hélène et Pâris, d'après un vase grec.

La longue histoire d'Hélène, qui commence avec les amours de Zeus et de Némésis et se termine dans une île de la Mer Noire, a été évoquée à de nombreuses reprises.

Elle eut un rôle central dans la Guerre de Troie et c'est Homère, notre plus ancien "mythographe" qui nous apprend qu'Hélène, fille de Zeus, était l'épouse du roi de Sparte Ménélas. Elle fut enlevée par Pâris, prince de Troie et, pour la récupérer, les rois grecs, dirigés par Agamemnon, frère de Ménélas, engagèrent la légendaire (et peut-être historique) guerre de Troie, dont le siège dura 10 années.

Dans l'Iliade, nous la voyons, voilée de blanc, du haut des remparts de Troie, nommer et décrire aux Anciens de Troie les rois grecs engagés dans la bataille. Nous la voyons pleurer sur le cadavre d'Hector. Dans l'Odyssée, elle assiste aux noces de sa fille unique Hermione avec Pyrrhus, fils d'Achille, et elle avouera avoir trahi les Troyens, en ne révélant pas la présence d'Ulysse dans les murs de la cité. Toujours, sa beauté subjugue, mais elle est detestée par la plupart des Troyens, et seuls le vaillant Hector et le vieux Priam savent qu'elle n'a été que le jouet des dieux, résolus à perdre Troie.

Ce n'est plus la femme éprise du beau Pâris que nous décrit Homère, mais une femme pleine de nostalgie pour son ancienne vie, et pour Ménélas... Son éloge sur le corps d'Hector est ambigu et plutôt accusateur pour une famille qui ne l'aimait pas. Homère nous la décrit souvent tissant, comme Pénélope.

Il faut consulter beaucoup de textes anciens pour reconstruire cette histoire complexe, pleine de contradictions et surtout riche d'aventures.

Léda était l'épouse du roi Tyndare de Sparte. Elle fut aimée de Zeus qui se transforma, pour la séduire, en cygne. Et, la même nuit, elle s'unit aussi à son époux. Lorsqu'elle pondit, à leur terme, deux oeufs, il en sortit 4 enfants, dont deux, Hélène et Pollux, étaient enfants de Zeus. Les deux autres, une fille, Clytemnestre et un fils, Pollux, étaient les enfants de Tyndare. Castor et Pollux, connus sous le nom de "Dioscures", s'illustrèrent au cours de nombreuses aventures.

Mais d'autres poètes font l'Hélène la fille de Némésis, la vengeance divine. Némésis fut aimée de Zeus et, pour lui échapper, elle se transforma en toutes sortes de créatures, pour finalement prendre la forme d'une oie sauvage. Aussitôt, le dieu se métamorphosa en cygne et s'unit à elle. Il en naquit un oeuf, que trouvèrent des bergers. Ceux-ci le confièrent à la reine Léda qui l'enferma dans un coffre. Selon certains, il en naquit Hélène et les Dioscures et, selon d'autres, Hélène seulement, qui grandit rapidement en beauté et que Léda et Tyndare élevèrent comme leur propre fille.

Homère, malheureusement, ne nous éclaire pas beaucoup plus sur la généalogie d'Hélène : il en fait la fille de Zeus, mais ne cite ni Léda, ni Tyndare. Pour lui, Léda et Tyndare eurent ensemble les Dioscures Castor et Pollux, sans aucune intervention divine.

Sa beauté n'avait pas échappé à Thésée et à son ami Pirithoos qui décidèrent de l'enlever. L'occasion se présenta alors que la toute jeune fille était au temple d'Artémis, en train d'offrir des sacrifices. Thésée, prince athénien, voulut la ramener dans son palais, mais les Athéniens craignaient de couvrir le rapt d'Hélène. Alors Thésée retourna dans le palais de sa mère Aethra, à Aphidna, et lui confia Hélène.

Lorsqu'Hélène fut en âge de se marier, et Thésée avait gardé la ferme intention d'en devenir le mari, Pirithoos le décida à l'aider à lui trouver une épouse, une autre fille de Zeus. Celui-ci, par dédain, engagea les deux hommes à descendre au Tartare pour enlever rien moins que Peséphone, épouse d'Hadès, dieu des Enfers. Et c'est lorsqu'ils partirent pour ce royaume des morts que les Dioscures, à la tête d'une armée, entreprisent de récupérer Hélène. Ils partirent d'abord pour Athènes, qu'ils ravagèrent, la cité et toute la région de l'Attique, lorsque les Athéniens se déclarèrent incapables de la leur rendre ni de leur dire où elle se trouvait. Un habitat de Décélie, finalement, leur confia qu'Hélène se trouvait à Aphidna, chez la mère du héros. Mais ils ne traitèrent pas Aphidna comme ils l'avaient fait de l'Attique et se comportèrent au contraire très noblement, allant jusqu'à participer aux mystères d'Eleusis que l'on célébrait dans cette ville. On leur rendit Hélène sans qu'il fut besoin de verser le sang. Et, à leur retour des Enfers, plusieurs années plus tard, après de nombreuses aventures, ni Thésée, ni Pirithoos, ne put épouser une fille de Zeus. Mais, selon certains, Thésée n'aurait pas respecté la jeune fille, qui lui aurait donné une fille, Iphigénie. Celle-ci joue un rôle au début de la Guerre de Troie.

De retour à Sparte, Hélène, pour sa beauté comme pour la richesse du royaume de Sparte, et malgré son aventure, eut de nombreux prétendants. Tous les princes de la Grèce se présentèrent, sauf Achille - on ne sait trop pourquoi...

Devant tant de prétendants, il y avait un risque certain de voir les choses s'envenimer par trop de déceptions lorsque l'élu serait désigné. C'est l'ingénieux Ulysse qui conseilla Tyndare : il fit préter serment aux prétendants, un serment selon lequel ils s'engageaient à respecter le choix d'Hélène et à porter secours au vainqueur si celui-ci en avait besoin. C'est ce serment que leur rappela Ménélas lorsque Pâris enleva Hélène et qui les entraîna dans la guerre de Troie.

Hélène choisit Ménélas, qui devint l'héritier de Tyndare au trône de Sparte. Les époux eurent une fille, Hermione. Tout paraissait pour le mieux dans le meilleur des mondes, mais c'était compter sans les tours d'Aphrodite. La déesse avait promis à Pâris l'amour de la plus belle femme du monde, et c'est ce qu'elle lui donna. Pâris, aidé d'Aphrodite, s'embarqua pour Sparte et fut reçu chez Ménélas. Lorsque celui-ci fut appelé en Crète pour assister aux funérailles de Catrée, la voie était libre et Pâris enleva Hélène. Selon certains, c'est Tyndare lui même qui confia à Pâris la main d'Hélène, et, selon d'autres, Aphrodite donna à Pâris les traits de Ménélas pour mieux séduire Hélène.

Le voyage vers Troie passa par l'Egypte, à l'autre bout de la Méditerranée, patrie du roi Protée. Il leur donna d'abord l'hospitalité, mais, lorsqu'il apprit leur histoire, il en fut tellement choqué qu'il garda Hélène près de lui, en Egypte (et c'est ainsi qu'on la nomme parfois "Hélène d'Egypte") et il renvoya avec Pâris un fantôme aux traits d'Hélène, créature qu'il fabriqua grâce à sa magie. Cette histoire, qu'Homère ne connaissait pas, fut révélée, dit-on, par Hélène elle-même.

En effet, bien longtemps après ces évènement, tous les héros de cette histoire étant morts depuis longtemps, un poète grec du nom de Stésichore avait critiqué sévèrement, sous la forme d'un poème satyrique, la conduite d'Hélène. Peu de temps après, il fut frappé de cécité. C'est un homme de Crotone, nommé Léonymos, qui permit à Stésichore de recouvrer la vue.

Léonymos fut le premier à visiter une certaine île, baptisée Leucippé, l'île Blanche, située à l'embouchure du Danube dans le Pont-Euxin (aujourd'hui, la Mer Noire). C'est une île de 20 stades de circonférence, recouverte de forêts, grouillante de gibier et de bétail, où se dresse un temple au héros Achille. Et là, il vit Achille, et Ajax fils d'Oïlée et Ajax fils de Télamon, Patrocle et Antilochos. Et il vit enfin Hélène, mariée à Achille, qui lui demanda de faire voile vers Himéra, où se trouvait le poète aveugle, pour lui annoncer que sa cécité avait pour cause sa propre colère.

Dès que le poète Stésichore se rétracta en public, il recouvrit la vue.

Un support particulier : la tapisserie

Une vision médiévale d'Hélène : son arrivée à Troie avec Pâris.

Pâris, accompagné de son fantôme, poursuivi son voyage vers Troie et s'arrêta à Sidon, en Phénicie, dont Pâris pilla le palais, puis à Chypre, l'île d'Aphrodite. Lorsqu'il arriva enfin à Troie, ses parents Priam et Hécube furent émerveillés de la beauté d'Hélène, mais, déjà, des ambassadeurs arrivaient au palais pour réclamer le retour de l'épouse de Ménélas. Devant le refus obstiné de Pâris de rendre Hélène, et malgré la foule des Troyens qui réclamaient le départ de la belle spartiate, la guerre ne tarda pas à éclater.

Selon Homère, qui ne connaissait pas l'histoire du fantôme créé par Protée, l'attitude d'Hélène était devenue nettement favorable aux Grecs, du moins lorsque la fin de Troie fut proche. Elle pleure son époux Ménélas avant d'aller le guetter du haut des remparts de Troie, pendant la bataille. Elle ne trahit pas Ulysse lorsque celui-ci, déguisé en mendiant, entra dans la cité pour l'espionner, et alla même jusqu'à l'aider quand il revint, plus tard, pour dérober la statue d'Athéna qui protégeait la ville et que l'on nommait le Palladion. Enfin, elle agita le flambeau qui déclancha l'ultime attaque des Grecs.

Son retour à Sparte fut mouvementé et dura 8 années au cours desquels elle connut la faim et frôla la mort. Le capitaine qui guidait le navire fut mordu par un serpent et en mourut lorsqu'ils furent jeté sur la côte d'une île d'Egypte. En son honneur, ils baptisèrent l'île du nom du capitaine, Pharos. Et c'est ainsi que tous les "phares" du monde portent le nom de ce capitaine...

Il existe de nombreuses versions de la mort d'Hélène, toutes contradictoires, impliquant ou non Ménélas. Quoiqu'il en soit, sans doute parce qu'elle était fille de Zeus, elle ne rejoignit pas les Enfers après sa mort, mais l'île Blanche que nous avons citée, au large de l'embouchure du Danube où son ombre, accompagnée de celle de son dernier mari, Achille, profitent à jamais de plaisirs qui n'ont rien de céleste...

Le déluge de Deucalion

Deucalion et Pyrrha

Deucalion et Pyrrha jetant des pierres par-dessus leurs épaules, desquelles pierres naissent des enfants. Au loin, les mêmes, au temple de Thémis. Gravure d'une édition du XVIe siècle des Métamorphoses d'Ovide.

Le déluge de Noé que raconte la Bible n'a pas été le seul déluge que connut l'humanité, et, en toute possibilité, notre époque n'est pas la première à subir des désordres climatiques.

L'histoire de Deucalion et de son épouse Pyrrha appartient à la mythologie "tardive", puisque la première mention de ce déluge a été faite dans la Bibliothèque d'Apollodore.

Promethée eut un fils, Deucalion. Et Epiméthée, frère de Prométhée, une fille, Pyrrha. La mère de Pyrrha était Pandore, la créature belle, habile et menteuse qui avait été envoyée aux hommes par Zeus pour leur malheur. Après avoir vécu, auprès de son père, dans le pays barbare des Scythes, au Nord du Caucase, Deucalion s'établit avec son épouse en Thessalie, près de la montagne Parnasse (où deux sommets voisins sont consacrés l'un à Apollon, l'autre à Dyonisos).

Mais envoyer aux hommes Pandore pour les punir d'avoir obtenu le feu de Prométhée n'avait pas été jugé suffisant par Zeus qui voulait détruire l'espèce humaine, sauf, dit-on, les plus vertueux d'eux tous, Deucalion et Pyrrha.

Lorsque Zeus décida de déverser sur la terre un déluge qui noirait hommes, bêtes et cultures, Prométhée, on ne sait comment, l'apprit et prévint son fils qui était allé lui rendre visite en Scythie.

Deucalion et Pyrrha rassemblèrent tout ce qui serait nécessaire dans un coffre et s'y retirèrent. Quand l'eau commença à descendre, au bout de neuf jours et neuf nuits, le coffre se posa sur la montagne Parnasse. Outre Deucalion et Pyrrha, seuls ceux qui s'étaient réfugiés dans les montagnes avaient survécu.

Deucalion et Pyrrha, dès qu'ils purent descendre de la montagne, se rendirent dans le temple de Thémis, la Titanide de la Justice qui fut épouse de Zeus et mère des Heures (ou Saisons) et des Moires (ou Parques, selon la terminologie latine), ou, selon Eschyle, mère de Prométhée. Là, ils entendirent l'oracle de la Titanide : "Sortez du temple, voilez-vous le visage, détachez vos ceintures et jetez derrière vous les os de votre mère."

Ils furent d'abord surpris, puis alarmés que la Titanide leur donne ce conseil si impie. Puis ils se rendirent compte qu'ils avaient chacun une mère différente, et comprirent enfin que cette "mère" commune était Gaïa, la Terre-mère, et que ses os étaient les pierres. Ils en ramassèrent et les jetèrent par dessus leurs épaules, sans regarder derrière eux, et "celles que Deucalion jetait se changeaient en hommes, celles que Pyrrha jetait se changeaient en femmes."

Ovide, dans ses Métamorphoses, donne une version très belle et très poétique de ce déluge, mais malheureusement d'un intérêt plus littéraire que mythologique.

La légende d'Adonis

Vénus et Adonis, par Rubens

Vénus et Adonis, par Rubens (détail)

Adonis fut le plus célèbre amant d'Aphrodite et sa mort tragique laissa la déesse longtemps inconsolable. Mais, derrière cette façade poétique se cache un mythe complexe, fait d'inceste, de jalousie et de meurtre.

Adonis d'après Ovide

C'est Ovide, le poète latin des 1er et 2e siècles après J.C., qui, dans ses Métamorphoses, nous a laissé le texte le plus poétique et le plus célebre sur la naissance, les amours et la fin tragique d'Adonis.

Myrrha, la fille du roi Cyniras, nourissait une passion incestueuse pour son père. Desespérée, elle finit par se confier à sa nourrice. Celle-ci, qui craignait que la jeune fille ne mette fin à ses jours, ennivra le roi et Myrrha passa ainsi plusieurs nuits avec lui.

Lorsque le roi comprit que son amante inconnue était sa propre fille, il saisit son épée et la poursuivit jusqu'en Arabie où elle s'était réfugiée. Mais la jeune fille se transforma en myrrhe, l'arbre à la sève parfumée et les larmes de Myrrha, en encens. Un enfant commença à grandir sous le tronc de l'arbre et, lorsque le terme fut arrivé, Aphrodite sépara l'arbre en deux et un garçon d'une grande beauté sortit d'entre les morceaux du tronc. Il fut appelé Adonis.

Lorsqu'il grandit, la déesse se prit de passion pour lui et tenta vainement de l'éloigner de son goût pour la chasse. Mais un jour, alors que la déesse était en route pour Chypre sur son char attelé de cygnes, Adonis blessa de ses flèches un sanglier qui se retourna contre le chasseur et le tua. Aphrodite, qui avait entendu les plaintes de son amant et avait fait faire demi-tour à son attelage, vit expirer Adonis, baignant dans son sang. Elle fit en sorte que sa mort soit célebrée chaque année lors de fêtes solennelles. Du sang d'Adonis poussèrent des fleurs nouvelles qui prirent son nom.

Adonis d'après la Bibliothèque d'Apollodore

Mais la Bibliothèque du pseudo-Apollodore (sans doute contemporaine d'Ovide) nous donne une toute autre version du mythe de la naissance d'Adonis.

La Bibliothèque nous donne plusieurs origines possibles pour Adonis :

- il serait le fils de Cyniras (sans allusion à quelque amour coupable que ce soit), lui-même descendant du dieu Hermès par Céphale,

- il serait (d'après un texte inconnu d'Hésiode) le fils de Phénix,

- ou bien celui de Thyas, roi d'Assyrie, et de sa fille Smyrna (dont le nom, comme Myrrha, signifie "myrrhe", l'arbre qui donne l'encens). Voici ce qu'écrit le pseudo-Apollodore :

« Aphrodite, en colère contre Smyrna qui ne lui rendait pas les honneurs dus, fit en sorte qu'elle tombe amoureuse de son père ; avec l'aide de sa servante, la jeune fille dormit pendant douze nuits avec son père, sans que ce dernier la reconnût. Mais quand il se rendit compte que c'était sa fille, il sortit son épée et la poursuivit ; poussée dans ses derniers retranchements, elle pria les dieux qu'ils la rendent invisible. Les dieux prirent Smyrna en pitié et la métamorphosèrent en cette plante que l'on appelle justement "smyrna" ou "myrrhe". Neuf mois plus tard, la plante s'ouvrit et un enfant naquit, appelé Adonis ; il était si beau qu'Aphrodite, à l'insu des dieux, le plaça tout bébé dans une corbeille et le confia à Perséphone pour qu'elle le cache. Mais Perséphone, quand elle le vit, ne voulut plus le rendre à Aphrodite. Aussi, sur décision de Zeus, l'année fut divisée en trois ; il ordonna qu'Adonis reste seul un tiers de l'année, avec Perséphone un autre tiers, et avec Aphrodite le dernier tiers. Mais Adonis resta avec elle aussi durant cette partie de l'année où il aurait dû rester seul. Ensuite, lors d'une partie de chasse, il fut blessé par un sanglier et mourut. » (Pseudo-Apollodore, Bibliothèque, 3. 14. 4, trad. Ugo Bratelli).

La Bibliothèque nous précise également qu'Adonis, alors qu'il était encore un enfant, s'attira la colère d'Artémis, qu'il fut blessé par un sanglier au cours d'une partie de chasse et qu'il en mourut.

Adonis d'après les Hymnes orphiques

Un Hymne Orphique est dédié à Adonis :

(Rappelons que les Hymnes Orphiques sont des textes liés aux cultes et aux mystères orphiques. Selon la légende, ils auraient été composés par le poète "divinisé" Orphée. Ils auraient été, soit compilés, soit même rédigés à des dates que les spécialistes ont du mal à préciser : entre le 3e siècle avant J.C. et le 2e siècle après J.C.)

« Écoute-moi, illustre Adonis, que j'invoque sous différents noms, dieu à la belle chevelure, qui te plais dans la solitude et qui brilles par les grâces les plus délicates, conseiller bienveillant, dieu aux formes variées, noble aliment de toutes choses, jeune vierge et jeune homme tout à la fois, Adonis toujours florissant, toi qui as succombé et qui renais au retour des saisons annuelles, dieu toujours jeune et aimable, toi qu'on adore en versant des larmes, dieu charmant qui aimes la chasse, dieu à la magnifique chevelure, cœur bien-aimé de Cypris [Aphrodite], germe d'amour, toi qu'enfanta la divine Proserpine aux beaux cheveux, toi qui habites maintenant dans les profondeurs du Tartare, reviens de nouveau dans l'Olympe et accorde à tes prêtres les fruits délicieux de la terre. »

Adonis dans le Myrobiblon

Mais c'est dans le Myrobiblon  que l'on trouve les détails les plus étranges sur Adonis. Les fragments cités sont attribués à un grammairien d'Alexandrie, Ptolémée Chennus.

Selon lui, Adonis fut aimé à la fois par Aphrodite, par Héraclès et par Apollon. Pour cela, Adonis devint hermaphrodite et se comportait comme un homme avec Aphrodite et comme une femme avec Apollon. Et c'est Apollon, irrité contre Adonis, qui, sous forme d'un sanglier sauvage, tua le jeune homme.

Il est dit aussi qu'il existe un rocher, sur l'île de Leucade en Ionie (ouest de la Grèce), duquel il suffit de se jeter dans la mer pour se guérir du mal d'amour. Zeus l'a consacré lorsqu'il voulut se défaire de sa passion pour Héra, et c'est là qu'Aphrodite se guérit également de son amour pour Adonis.

Encore quelques détails

Selon un autre auteur tardif, Nonnos de Panopolis (poète grec né en Egypte et actif au 5e siècle après J.C.), Adonis a été tué par Arès, amant d'Aphrodite, déguisé en sanglier. Cette version du mythe est attestée par une nombreuse iconographie.

Enfin, d'après Pausanias, la ville d'Amathonte à Chypre avait un temple dédié à Aphrodite et à Adonis. On dit qu'il abritait un collier fabriqué par le dieu Héphaïstos et qui fut offert à Harmonie, fille d'Arès et d'Aphrodite.

Quelques remarques

La légende d'Adonis est ancienne, et revêt plusieurs formes. Comme Aphrodite, Adonis vient du Proche ou du Moyen-Orient (son nom est d'origine clairement sémitique et signifie "seigneur") où, jusque dans l'Antiquité tardive, un culte lui était rendu.

Plusieurs divinités d'importance sont associées à cette légende : Aphrodite, d'adord, mais aussi, d'une manière qui a été quelque peu gommée par les auteurs tardifs, Artémis (par l'amour de la chasse qu'a le héros), Apollon (en tant qu'amant d'Adonis), Arès (en tant qu'amant jaloux d'Aphrodite), Héraclès (en tant qu'amant d'Adonis) et même Perséphoné (ou proserpine), épouse du dieu des enfers Hadès et qui serait la mère d'Adonis selon un hymne orphique.

Une constante, dans cette légende, est le sanglier, qu'il fût lancé par l'un quelconque des dieux cités : cette partie du mythe rappelle l'histoire d'Ulysse, blessé à la cuisse par un sanglier et dont la cicatrice le fait reconnaître par la nourrice Euryclée. Mais Ulysse, lui, survécut à sa blessure. Robert Graves propose une intéressante interprétation : cette blessure (ou mise à mort) par un sanglier sauvage (ou guidé par un dieu) était liée aux cultes matriarcaux où le roi (ou amant de la reine-prêtresse) était mis à mort, peut-être chaque année (lien avec un culte solaire, Apollon étant un dieu solaire).

Nous avons cité Nonnos de Panopolis : celui-ci nous conte, dans ses Dionysiaques, l'histoire de la fille d'Aphrodite et d'Adonis, Béroé, qui fut aimée à la fois de Dionysos et de Poséidon. On peut lire ses aventures dans les chants 41.42 et 43 des Dionysiaques, sur le site de Philippe Remacle

La légende de Daphné

Apollon et Daphné, par Tiepolo

Apollon et Daphné, par Tiepolo

Daphné fut l'une des amours malheureuses d'Apollon, sans doute la plus célèbre. C'est le poète latin Ovide qui l'immortalisa dans ses Métamorphoses.

Et pourtant, elle est à peine évoquée dans les textes grecs comme latins avant le premier siècle avant J.C. Ni Homère, ni Hésiode n'en font mention, ni les grands auteurs tragiques, ni les poètes ultérieurs : rien avant Parthénios de Nicée.

Daphné fait l'objet de deux légendes :

Le prince Leucippe, fils d'Oemanos, roi de Pise en Élide (*) tombe également amoureux de Daphné. Il imagine la ruse suivante : il se déguisera en jeune fille et accompagnera son aimée à la chasse. Apollon, jaloux, car il était également amoureux de Daphné, inspire à celle-ci l'idée de se baigner dans la rivière Ladon (*). Lorsqu'elles constatent qu'elles ont été trompées (il faut bien se deshabiller pour se baigner dans la rivière), Daphné et ses compagnent transpercent Leucippe de leurs lances. Ce carnage peut rappeler la cruelle mise à mort d'Orphée par les femmes thraces.

(*) L'Élide est la région de la Grèce où se trouve Olympie. Le Ladon est un fleuve d'Arcadie, la région voisine. Toutes deux sont situées dans la presqu'île du Péloponnèse, au sud-ouest de la Grèce.

La seconde légende parle seulement de l'amour malheureux d'Apollon pour Daphné, qui préfère de loin la chasse à la compagnie des mâles, qu'ils soient divins ou humains. Lorsque le dieu commença à la poursuivre, elle s'enfuit, demandant protection à la Terre-Mère. Alors, la terre l'accueillit et la jeune fille se transforma en laurier. Apollon, en souvenir, coupa une branche de l'arbre et la posa sur sa tête en guise de couronne.

La première mention de Daphné : Parthénios de Nicée

C'est Parthénios de Nicée, poète du 1er siècle av. J.-C, et tuteur du grand poète latin Virgile, qui, le premier, nous conte l'histoire de Daphné, dans son seul ouvrage qui nous reste, les Erotica Pathemata, ou "passions amoureuses", recueil de quelques amours malheureuses de la Mythologie :

"C'est ainsi que l'histoire de Daphné, fille d'Amyclas, est racontée. Elle n'allait jamais dans la cité, ni ne s'associait avec les autres jeunes filles ; mais elle avait des meutes nombreuses, en Laconie et dans les lointaines montagnes du Péloponnèse. Par sa passion de la chasse, elle était devenue chère à Artémis, qui lui avait donné le don de viser juste. Un jour, elle dut traverser l'Elide, et là Leucippe, fils d'Oenomaos, tomba amoureux d'elle ; il résolut de ne pas la courtiser de la manière traditionnelle, mais se revêtit de vêtements féminins et la rejoignit à la chasse. Et il advint qu'elle devint rapidement très attachée à lui, ne voulant pas qu'il s'éloigne, l'embrassant et s'accrochant à lui tout le temps. Mais Apollon était aussi amoureux de la jeune fille, et c'est avec un sentiment de colère et de jalousie qu'il vit Leucippe avec elle ; il lui mit dans l'esprit d'aller se baigner dans un fleuve avec ses suivantes. À leur arrivée, elles commencèrent à se déshabiller, et quand elle virent que Leucippe n'était pas près à suivre leur exemple, elles lui ôtèrent ses vêtements de force et, lorsqu'elles constatèrent qu'elles avaient été trompées et qu'il avait ourdi un complot contre elles, elles plongèrent leurs lances dans son corps. Mais il disparut, par la volonté des dieux. Daphné, qui voyait Apollon s'avancer vers elle, s'enfuit et, comme il la poursuivait, elle implora Zeus d'être soustraite de la vue des mortels. Et l'on suppose qu'elle est devenue l'arbre qui porte son nom en grec, le laurier."

Hygin

Hygin, un auteur latin contemporain de Parthénios, cite également Daphné dans une de ses fables : "Quand Apollon poursuivit Daphné, fille du fleuve Pénée, elle demanda la protection de la Terre Mère, qui la reçut, et qui la changea en laurier. Apollon en coupa une branche et la plaça sur sa tête." C'est ainsi que l'on représente ordinairement Apollon coiffé d'une couronne de laurier, couronne qui reste encore aujourd'hui symbole de victoire.

Pausanias

Pausanias, au 2e siècle ap. J.-C., nous donne également quelques informations sur le mythe de Daphné et d'Apollon :

... Leucippe était fils d'Oenomaüs, roi de Pise; le jeune prince passionnément amoureux de Daphné comprit que s'il la recherchait ouvertement en mariage il s'exposerait à un refus, parce qu'elle avait de l'aversion généralement pour tous les hommes : voici donc le stratagème dont il s'avisa.

Il laissa croître ses cheveux pour en faire, disait-il, un sacrifice au fleuve Alphée ; après les avoir noués à la manière des jeunes filles il prit un habit de femme et alla voir Daphné ; il se présenta à elle sous le nom de la fille d'Oenomaüs, et lui témoigna avoir grande envie de faire une partie de chasse avec elle. Daphné fut trompée à l'habit, et Leucippe passa pour une fille. Comme d'ailleurs sa naissance et son adresse lui donnaient un grand avantage sur toutes les compagnes de Daphné, et qu'il n'oubliait rien pour lui plaire, il eut bientôt gagné ses bonnes grâces.

Ceux qui mêlent les amours d'Apollon avec cette aventure ajoutent que le dieu piqué de voir Leucippe plus heureux que lui, inspira à Daphné et à ses compagnes l'envie de se baigner dans le Ladon ; que Leucippe fut contraint de quitter ses habits comme les autres, et qu'ayant été reconnu pour ce qu'il était, il fut tué à coups de flèches ou de poignard. Voilà ce que disent les Arcadiens.

 

Ovide

Bien que nous ayons pris le parti de ne consulter que les écrivains de la Grèce antique, nous cierons quand même le grand poète latin Ovide (43 av. J.-C. - 17 ap. J.-C.) qui "popularisa" les amours malheureuse d'Apollon et de Daphné, dans son recueil d'histoires mythologiques, les Métamorphoses. Voici une traduction de l'épisode de Daphné :

"Daphné, fille du fleuve Pénée, fut le premier objet de la tendresse d'Apollon. Cette passion ne fut point l'ouvrage de l'aveugle hasard, mais la vengeance cruelle de l’Amour irrité. Le dieu de Délos (Apollon), fier de sa nouvelle victoire sur le serpent Python, avait vu le fils de Vénus (Éros ou, en latin, Cupidon, dieu de l'amour) qui tendait avec effort la corde de son arc : "Faible enfant, lui dit-il, que prétends-tu faire de ces armes trop fortes pour ton bras efféminé ? Elles ne conviennent qu'à moi, qui puis porter des coups certains aux monstres des forêts, faire couler le sang de mes ennemis, et qui naguère ai percé d'innombrables traits l'horrible Python qui, de sa masse venimeuse, couvrait tant d'arpents de terre. Contente-toi d'allumer avec ton flambeau je ne sais quelles flammes, et ne compare jamais tes triomphes aux miens."

L'Amour répond : "Sans doute, Apollon, ton arc peut tout blesser; mais c'est le mien qui te blessera; et autant tu l’emportes sur tous les animaux, autant ma gloire est au-dessus de la tienne". Il dit, et frappant les airs de son aile rapide, il s'élève et s'arrête au sommet ombragé du Parnasse : il tire de son carquois deux flèches dont les effets sont contraires; l'une fait aimer, l'autre fait haïr. Le trait qui excite l'amour est doré; la pointe en est aiguë et brillante : le trait qui repousse l'amour n'est armé que de plomb, et sa pointe est émoussée. C'est de ce dernier trait que le dieu atteint la fille de Pénée; c'est de l'autre qu'il blesse le cœur d'Apollon. Soudain Apollon aime; soudain Daphné fuit l'amour : elle s'enfonce dans les forêts, où, à l'exemple de Diane, elle aime à poursuivre les animaux et à se parer de leurs dépouilles : un simple bandeau rassemble négligemment ses cheveux épars.

Plusieurs amants ont voulu lui plaire; elle a rejeté leur hommage. Indépendante, elle parcourt les solitudes des forêts, dédaignant et les hommes qu'elle ne connaît pas encore, et l'amour, et l'hymen et ses nœuds. Souvent son père lui disait "ma fille, tu me dois un gendre"; il lui répétait souvent "tu dois, ma fille, me donner une postérité". Mais Daphné haïssait l'hymen comme un crime, et à ces discours son beau visage se colorait du plus vif incarnat de la pudeur. Jetant alors ses bras délicats autour du cou de Pénée : "Cher auteur de mes jours, disait-elle, permets que je garde toujours ma virginité. Jupiter lui-même accorda cette grâce à Diane". Pénée se rend aux prières de sa fille. Mais, ô Daphné ! que te sert de fléchir ton père ? ta beauté ne te permet pas d'obtenir ce que tu réclames, et tes grâces s'opposent à l'accomplissement de tes vœux.

Cependant Apollon aime : il a vu Daphné; il veut s'unir à elle : il espère ce qu'il désire; mais il a beau connaître l'avenir, cette science le trompe, et son espérance est vaine. Comme on voit s'embraser le chaume léger après la moisson; comme la flamme consume les haies, lorsque pendant la nuit le voyageur imprudent en approche son flambeau, ou lorsqu'il l'y jette au retour de l'aurore, ainsi s'embrase et brûle le cœur d'Apollon; et l'espérance nourrit un amour que le succès ne doit point couronner.

Il voit les cheveux de la Nymphe flotter négligemment sur ses épaules : Et que serait-ce, dit-il, si l'art les avait arrangés ? Il voit ses yeux briller comme des astres; il voit sa bouche vermeille; il sent que ce n'est pas assez de la voir. Il admire et ses doigts, et ses mains, et ses bras plus que demi nus; et ce qu'il ne voit pas son imagination l'embellit encore. Daphné fuit plus légère que le vent; et c'est en vain que le dieu cherche à la retenir par ce discours :

"Nymphe du Pénée, je t'en conjure, arrête ! ce n'est pas un ennemi qui te poursuit. Arrête, nymphe, arrête ! La brebis fuit le loup, la biche le lion; devant l'aigle la timide colombe vole épouvantée : chacun fuit ses ennemis; mais c'est l'amour qui me précipite sur tes traces. Malheureux que je suis ! prends garde de tomber ! que ces épines ne blessent point tes pieds ! que je ne sois pas pour toi une cause de douleur ! Tu cours dans des sentiers difficiles et peu frayés. Ah ! je t'en conjure, modère la rapidité de tes pas; je te suivrai moi-même plus lentement. Connais du moins l'amant qui t'adore : ce n'est point un agreste habitant de ces montagnes; ce n'est point un pâtre rustique préposé à la garde des troupeaux. Tu ignores, imprudente, tu ne connais point celui que tu évites, et c'est pour cela que tu le fuis. Les peuples de Delphes, de Claros, de Ténédos, et de Patara, obéissent à mes lois. Jupiter est mon père. Par moi tout ce qui est, fut et doit être, se découvre aux mortels. Ils me doivent l'art d'unir aux accords de la lyre les accents de la voix. Mes flèches portent des coups inévitables; mais il en est une plus infaillible encore, c'est celle qui a blessé mon cœur. Je suis l'inventeur de la médecine. Le monde m'honore comme un dieu secourable et bienfaisant. La vertu des plantes m'est connue; mais il n'en est point qui guérisse le mal que fait l'Amour; et mon art, utile à tous les hommes, est, hélas ! impuissant pour moi-même."

Il en eût dit davantage; mais, emportée par l'effroi, Daphné, fuyant encore plus vite, n'entendait plus les discours qu'il avait commencés. Alors de nouveaux charmes frappent ses regards : les vêtements légers de la Nymphe flottaient au gré des vents; Zéphyr agitait mollement sa chevelure déployée, et tout dans sa fuite ajoutait encore à sa beauté. Le jeune dieu renonce à faire entendre des plaintes désormais frivoles : l’Amour lui-même l'excite sur les traces de Daphné; il les suit d'un pas plus rapide. Ainsi qu'un chien gaulois, apercevant un lièvre dans la plaine, s'élance rapidement après sa proie dont la crainte hâte les pieds légers; il s'attache à ses pas; il croit déjà la tenir, et, le cou tendu, allongé, semble mordre sa trace; le timide animal, incertain s'il est pris, évite les morsures de son ennemi, et il échappe à la dent déjà prête à le saisir : tels sont Apollon et Daphné, animés dans leur course rapide, l'un par l'espérance, et l'autre par la crainte. Le dieu paraît voler, soutenu sur les ailes de l'Amour; il poursuit la nymphe sans relâche; il est déjà prêt à la saisir; déjà son haleine brûlante agite ses cheveux flottants.

Elle pâlit, épuisée par la rapidité d'une course aussi violente, et fixant les ondes du Pénée : "S'il est vrai, dit-elle, que les fleuves participent à la puissance des dieux, ô mon père, secourez-moi ! ô terre, ouvre-moi ton sein, ou détruis cette beauté qui me devient si funeste" ! À peine elle achevait cette prière, ses membres s'engourdissent; une écorce légère presse son corps délicat; ses cheveux verdissent en feuillages; ses bras s'étendent en rameaux; ses pieds, naguère si rapides, se changent en racines, et s'attachent à la terre : enfin la cime d'un arbre couronne sa tête et en conserve tout l'éclat. Apollon l'aime encore; il serre la tige de sa main, et sous sa nouvelle écorce il sent palpiter un cœur. Il embrasse ses rameaux; il les couvre de baisers, que l'arbre paraît refuser encore : "Eh bien ! dit le dieu, puisque tu ne peux plus être mon épouse, tu seras du moins l'arbre d'Apollon. Le laurier ornera désormais mes cheveux, ma lyre et mon carquois : il parera le front des guerriers du Latium, lorsque des chants d'allégresse célébreront leur triomphe et les suivront en pompe au Capitole : tes rameaux, unis à ceux du chêne, protégeront l'entrée du palais des Césars; et, comme mes cheveux ne doivent jamais sentir les outrages du temps, tes feuilles aussi conserveront une éternelle verdure."

Il dit, et le laurier, inclinant ses rameaux, parut témoigner sa reconnaissance, et sa tête fut agitée d'un léger frémissement."

avant Jason...

La Naissance de Vénus, par Botticelli (détail)

Le Dragon régurgitant Jason, sous le regard d'Athéna.

Jason, qui reconquit son royaume en apportant à son peuple les richesses et la magie de Colchide, figurées par la Toison d'Or et la magicienne Médée, était un prince de Thessalie, descendant d'une famille qui était déjà légendaire bien avant sa naissance.

Un descendant de Prométhée

Contrairement à de ce qui se passe pour de nombreux héros de la mythologie grecque, Zeus n'apparaît pas dans l'arbre généalogique de Jason. Jason se rattache à une autre branche divine, celle des Titans et, parmi les Titans, celui qui fit le plus de bien pour l'humanité (alors que Zeus ne la voit pas toujours d'un très bon oeil), Prométhée.

Le déluge de Deucalion

L'un des enfants de Prométhée, Deucalion, épousa Pyrrha, sa cousine, fille d'Epiméthée et de Pandore. Après avoir vécu, auprès de son père, dans le pays barbare des Scythes, au Nord du Caucase, il s'établit avec son épouse en Thessalie, près de la montagne Parnasse (où deux sommets voisins sont consacrés l'un à Apollon, l'autre à Dyonisos).

Deucalion et Pyrrha survécurent au plus célèbre déluge de la mythologie grecque, et repeuplèrent la terre en suivant l'oracle que leur avait fait leur grand-mère Thémis : "Sortez du temple, voilez-vous le visage, détachez vos ceintures et jetez derrière vous les os de votre mère." Ils ramassèrent donc des pierres, les "os" de la Terre-mère, et les jetèrent par dessus leurs épaules, sans regarder derrière eux. De ces pierres sortirent des hommes et des femmes.

Le père du peuple Hellène

Outre les "enfants de la terre", Deucalion et Pyrrha eurent plusieurs enfants. Parmi eux fut Hellen, ancêtre éponyme du peuple grec (le nom grec de la Grèce est "Hellas"). Ses fils se nommaient Éole, Doros et Xouthos qui fut le père d'Ion et d'Achaeos. Ainsi, Hellen engnedra les 4 "tribus" hellènes, les éoliens, les doriens, les ioniens et les achéens.

Éole

Éole est parfois confondu avec le gardien des Vents qui vit au sommet des montagnes des îles Éoliennes, au large de la Sicile. S'il est gardien des Vents, il n'est est pas le dieu et ne peut en disposer que sur les ordres de Zeus. Lorsqu'il commit l'imprudence de confier les Vents contraires à Ulysse, enfermés dans une outre, les compagnons du héros ouvrir l'outre et une tempête submergea les vaisseaux.

Il eut de nombreux enfants :

- Sisyphe, qui, après s'être opposé à Zeus, fut condamné à faire rouler indéfiniement une pierre au tartare,

- Salmonée fonda une ville qui portait son nom. Il épousa en premières noces Alcidicé, qui lui donna une fille, Tyro, et, devenu veuf, épousa Sidéro qui fut une belle-mère cruelle pour Tyro. Cet homme orgeuilleux usa de toutes sortes d'artifices pour imiter Zeus et sa foudre. Il fut fourdoyé par son modèle, lui et toute la ville de Salmoné.

- Alcyoné, était l'épouse de Céyx, fils d'Eophosphoros, l'Étoile du matin, et roi de Trachine, qui périt dans un naufrage alors qu'il allait à Claros consulter l'oracle d'Apollon. Désepérée, elle se précipita dans la mer, et Zeus récompensa cette fidélité conjugale en métamorphosant les deux époux en alcyons, ces beaux oiseaux de mer, et leur accorda des mers calmes chaque année, à l'époque de leur nidification, les "jours de l'alcyon".

- Céphale, alors qu'il était marié Procris, fut enlevé par Eôs, l'Aurore, qui était tombée amoureuse de sa beauté. On dit qu'il fut le père de Phaéton, mais les mythographes s'accordent en général pour affirmer qu'il resta fidèle à Procris, qu'il aimait passionément. Il tenta avec elle la même épreuve que celle que les deux héros du Cosi fan Tutte de Mozart imposèrent à leurs fiancées : il se déguisa en marchand et tenta de la séduire. Et, comme dans le Cosi, la femme céda. De honte, elle partit se cacher dans les bois. L'histoire ne s'arrête pas là, mais se termine tragiquement.

- Athamas : c'est ce même Athamas dont les deux enfants, Phryxos et Hellé, condamnés au sacrifice par leur belle-mère, s'enfuirent en Colchide sur le dos du bélier d'or.

- Créthée fonda la ville d'Iolcos, et épousa sa nièce Tyro, grand-mère de Jason.

Tyro

Tyro, fille de Salmonée, maltraitée par sa belle-mère Sidéro, fut élevée chez son oncle Créthée. Elle tomba amoureuse du dieu fleuve Enipée et venait sur ses rives pour pleurer. Poseidon l'y trouva et, ayant pris l'apparence d'Enipée, la séduisit : elle en eut deux enfants, Pélias et Nélée, qui, lorsqu'il furent grands, vengèrent leur mère en tuant Sidéro.

On raconte également que Sisyphe détestait Salmonée et qu'un oracle lui avait prédit qu'il ne pourrait se venger de son frère que s'il aurait un enfant avec Tyro. Il séduisit donc sa nièce qui mit au monde deux jumeaux qu'elle mit à mort lorsqu'elle connut leur destin. On dit que c'est pour cet inceste que Sisyphe fut supplicié au Tartare.

Tyro épousa finalement son oncle Créthée (étrangement, le mariage de Tyro et de Créthée n'est plus considéré comme un inceste) qui adopta les deux enfants qu'elle avait eus de Poséidon. Elle lui donna trois fils, Aeson, Phérès et Amythaon. Bien que Créthée eut adopté les deux enfants que Tyro avait eus de Poséidon avant son mariage, Aeson, par la loi du sang, était le prince héritier d'Iolcos. Mais ce fut Pélias, le fils ainé de Tyro, qui prit le pouvoir à la mort de son père adoptif.

Pélias

Pélias, fils de Tyro et de Poséidon, a mené une vie aventureuse avant de devenir l'usurpateur du trône de Créthée.

La naissance des jumeaux que Tyro engendra de Poséidon fut d'abord tenue secrète, et les enfants furent exposés, comme on le faisait pour les enfants non désirés. Ceux qui les trouvèrent, des gardiens de chevaux (et c'est étrange de constater à quel point tout ce qui se rapporte à Poséidon est toujours marqué du signe du cheval), leurs donnèrent leur nom : comme une jument frappa de son sabot le visage d'un des enfants, celui-ci fut nommé Pélias, qui signifie "tache sombre", et l'autre Nélée. L'un des gardiens prit avec lui les bébés et les éleva.

Lorsqu'ils furent grands, ils apprirent qui il étaient et commencèrent par partir en chasse de leur belle-mère Sidéro, qui avait fait subir tant de tourmnts à leur mère Tyro. Sidéro, pour échapper à la mort, se réfugia dans un temple, le temple d'Héra. Nélée craignait la déesse, mais Pélée, plus hardi, ou bien aveuglé par la fureur, égorgea Sidéro. Ce fut la première offense qu'il fit à la déesse "aux bras blancs", épouse de Zeus.

Une querelle éclata entre les deux frères, et Nélée s'exila, fonda la cité de Pylos et épousa Chloris, fille d'Amphion. Chloris lui donna une fille, Péro, et douze fils, dont l'un d'eux reçut de Poséidon le don de se métamorphoser, comme tant de divinités marines. Ce fils de Nélée, Périclymène, combattit contre Héraclès. Malgré de multiples transformations - lion, seprent, abeille - Héraclès eut raison du prince et le tua avec dix de ses frères. Seul Nestor fut sauvé, le cadet d'entre les fils de Nélée.

Pélias, quant à lui, s'établit en Thessalie, et épousa Anaxabie, fille de Bias. Il en eut un fils, Acaste, et quatre filles. Avant de prendre le pouvoir à Iolcos...

Aeson

Aeson prit femme (on ne connaît pas le nom de son épouse, ou plutôt, on la connaît sous beaucoup trop de noms pour en avoir une quelconque certitude) et de cette union naquit un fils, auquel on donna le nom de Diomède. Pour sauver cet enfant de l'épée de Pélias (car, en tant que descendant direct de Créthée, Diomède était destiné à régner sur Iolcos), sa mère le pleura comme s'il était mort-né, et toute se famille pleura avec elle. Mais l'enfant était bien vivant.

D'une manière étrange, cette mère qui avait manifesté tant de soins pour la sauvegarde de son enfant, au lieu de l'envoyer au loin, à la garde de parents bienveillants, exposa le bébé sur le mont Pélion comme on le faisait pour les enfants non désirés. Mais le destin lui sourit, et ce fut l'ingénieux Chiron, le Centaure, qui découvrit et éleva l'enfant, comme il l'avait fait déjà pour bien d'autres héros. Il lui donna le nom de Jason.

Un enfant abandonné, un royaume usurpé, un trésor à conquérir : tous les ingrédients sont là, l'histoire de Jason peut commencer...

la Toison d'or, objet de la quête antique

La Naissance de Vénus, par Botticelli (détail)

Le Dragon régurgitant Jason, sous le regard d'Athéna.

"C'est là qu'enfin vous découvrirez le palais d'Æétès et la forêt consacrée à Arès, dans laquelle la Toison d'Or est suspendue au haut d'un chêne. Un monstre horrible, un dragon furieux, veille sans cesse à sa garde; et jamais ses yeux ardents ne sont fermés par le doux sommeil."

Ainsi s'adresse à Jason le roi Phinée, dans l'épopée d'Apollonios de Rhodes, l'Argonautique, en remerciement des services de Jason qui l'a débarrassé des horribles Harpyes, Jason qui, pour reconquérir son royaume, partira avec 50 compagnons à la recherche de la Toison d'Or.

L'objet de la Quête antique

A l'époque médiévale, la Quête du Graal était le sujet favori des poètes et de leurs auditeurs. Dans l'Antiquité, c'est la Quête de la Toison d'Or qui fit voyager les esprits, au rythme des aventures de Jason et de ses compagnons les Argonautes. Mais qu'était donc cette fameuse Toison ?

L'origine du bélier d'or

Théophané était une princesse thrace d'une très grande beauté. Elle eut de nombreux prétendants, et même le dieu marin Poséidon en tomba amoureux. Il décida de l'enlever.

Ayant transformé sa bien-aimée en brebis, afin de la cacher aux regards, il l'emmena dans l'île de Cumissa dont il transforma les habitants en moutons. Mais Théophané restait, elle, la plus belle des brebis.

Ayant poursuivi la princesse jusqu'à l'île de Crumissa, les prétendants n'y trouvèrent donc que des moutons, qu'ils se mirent à manger, sans se douter qu'ils étaient observés par Poséidon. Le dieu les transforma en loups.

Sous la forme d'un grand bélier, Poséidon, finalement, s'unit à Théophané qui, à son terme, mit au monde un bélier d'or.

Note géographique : la Thrace (nommée encore Brébycie) était la région située au nord-est de la Grèce antique, et c'est aujourd'hui la partie européenne de la Turquie. Quant à l'île de Cumissa, on ignore où elle se trouve.

Phrixos et Hellé

Athamas, roi d'Orchomène, avait épousé Néphélé, dont le nom signifie "Nuée". Certains disent qu'il s'agissait de la nuée créée par Zeus à l'image d'Héra pour tromper l'ingrat Ixion, condamné au Tartare.

Athamas eut de Néphélé deux enfants, Phrixos et Hellé. Puis il s'éprit d'Ino et répudia Néphélé. Mais celle-ci, dans son malheur, ne fut pas oubliée par Héra et par Zeus.

Ino, qui avait donné à Athamas deux autres enfants, se prit de haine pour ceux de Néphélé et projeta de les perdre. Elle conçut un plan proprement machiavélique, qui n'épargna aucun habitant du pays d'Orchomène.

Ino commença par convaincre les femmes d'Orchomène de griller le blé qui devait servir aux semences et, lorsqu'on le planta, rien ne poussa. On ne récolta pas de blé cette année-là, et la famine s'installa sur le royaume. Athamas envoya donc à Delphes des émissaires pour demander un oracle. Mais Ino avait soudoyé les envoyés d'Athamas, et, lorsqu'ils rentrèrent à Orchomène, ils dirent au roi que la ramine s'arrêterait si l'on sacrifiait son premier fils, Phrixos, à Zeus.

Tout était prêt pour le sacrifice, et le couteau était déjà sur la tête de Phrixos, quand surgit le bélier d'or, fils de Poséidon, envoyé par Zeus. Le bélier enleva Phrixos, et Hellé, sa soeur, grimpa aussi sur le dos de l'animal. "Ne me laisse pas seule ici, disait-elle, à la merci de notre méchante belle-mère !" Le bélier, qui avait de grandes ailes, prit son envol et emmena les deux enfants. Néphélé, qui se tenait non loin de là, eut tout juste le temps de dire à son fils qu'il lui faudrait sacrifier le bélier en l'honneur de Zeus quant il arriverait au terme de son voyage. Ce "terme du voyage" se trouvait en Colchide, pays où régnait un roi-magicien : c'était le pays qui fasait face à la Thrace, de l'autre côté (la rive asiatique) du Pont-Euxin qui relie la mer Noire à la Mediterranée.

Hellé, prise de vertige, tomba dans la mer. On donna à cette mer le nom d'Hellespont (appelée plus tard le Pont-Euxin, et maintenant mer de Marmara), en son souvenir.

Quant à Phrixos, le bélier le déposa sans dommage en Colchide, où le roi Æétès l'accueillit et lui donna sa fille Chalciopé en mariage, sans demander de dot. Phrixos, qui n'était pas un ingrat, sacrifia le bélier en l'honneur de Zeus, comme sa mère le lui avait demandé, et donna la toison de l'animal fabuleux à Æétès.

Phrixos, qui passa toute sa vie en Colchide, eut quatre fils de son union avec Chalciopé, quatre fils qui se joignirent à l'expédition de Jason et retournèrent en Orchomène pour récupérer leur héritage.

Mais tout ceci est une autre histoire...

Note géographique : La Colchide était, encore dans l'antiquité, une région située sur la côte orientale de la Mer Noire (il est donc logique que, venant de Thrace, le bélier d'or passât par l'Hellespont pour rejoindre la Colchide). Cette région, bordée au nord par la chaîne du Causase et baignée par le Phase (aujourd'hui Rion), se nomme aujourd'hui Géorgie. Une petite région de Géorgie, située juste au pied du Caucase, s'appelle encore aujourd'hui "Kolchida".

Strabon

Le géographe greco-romain (grec, parce qu'il est né dans une province grecque d'Asie Mineure, romain, parce qu'à son époque, la Grèce était occupée par Rome) Strabon, qui vécut aux 1er siècle av. / 1er siècle ap. J.-C, nous légua une très importante somme géographique du monde connu, certes parfois périmée, mais complétissime pour l'époque. Il nous parle de Colchide et des régions avoisinantes dans le livre XI de sa géographie. Il y évoque des fleuves drainant des paillettes d'or que des peuples "barbares" recueillaient au moyen de toisons à longue laine...

La Toison d'or était-elle un objet magique, ou bien signifiait-elle la richesse d'une région aurifère ? Que partit chercher Jason, la magie ou la richesse ?

Et cette hypothèse n'éclairerait-elle pas d'une autre lumière l'histoire de Phrixos ? Suite à une famine, le fils ainé du roi est envoyé dans un pays réputé riche pour y chercher fortune afin d'acheter de quoi nourrir son peuple... Une histoire éternelle !

Hercules

Hercule est le fils de Zeus et d'Alcmène (une mortelle et femme d'Amphitryon). La mythologie raconte que Zeus ayant pris les traits d'Amphitryon (parti au combat) reussit a tromper la jeune femme et a passer la nuit avec elle. Celle ci croyant avoir passe la nuit avec son mari ne s'etonna pas de de voir rentrer le veritable epoux le lendemain. Elle eu deux fils: Iphiklès et Hercule.

Hera  est en fait la pire ennemie d'Hercule dans la realite.Par exemple, elle retarda sa naissance et envoya deux serpents pour le dévorer dans son berceau. Mais il les étouffa de ses mains.
 

Apres une solide education et quelques exploits a son actif il arrive a Thebes ou il epousera Megara, la fille de Creon le roi de Thebes. Tout aurait pu " aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possible" si Hera n'etait pas encore intervenue.

  En effet, elle le rendi fou au point que dans un exces de rage il tua sa femme et les enfants qu'il avait eu d'elle. D'autres versions suggerent qu'il ne tua pas Megara mais la remaria simplement à son neuveu pour se debarrasser d'elle.

Pour expier sa faute Hercule du accomplir 12 travaux imposes par le roi Eurysthée. Ces travaux titanesques etaient plus des epreuves que de veritables travaux d'utilite publique.Les 12 travaux sont: 


Le lion de Némée


L'hydre de Lerne


La biche Cérynite


Le sanglier d'Erymanthe

Les étables d'Augias


Les oiseaux du lac Stymphale


Le taureau de Crete


L'enlèvement des juments de Diomède


La ceinture de l'Amazone Hippolyté


Le combat contre Géryon

 

Les pommes du jardin des Hespérides


La capture du Cerbère


Apres avoir efectue tous ces travaux Hercule revint aupres d'Eurysthée. Celui ci etait en train de faire un sacrifice et ne reserva a Hercule que les morceaux destines ordinairement aux esclaves. Vexe, Hercule tua trois fils d'Eurysthée: Périmèdes, Eurybios et Eurypilos  

On connait a Hercule de nombreuses aventures amoureuses. Apres Megara, Hercules se retrouvera dans les bras des filles du roi Thespios, puis avec Omphale et enfin il epousera Déjanire, qu'il délaissa pour Iole.

  Cette deniere infidelite lui coutera la vie. En effet, Hercule eu un jour a traverser une riviere avec son epouse Déjanire. Nessos le centaure etait le passeur. Hercule traversa a la nage mais il confia sa femme au centaure. Celui ci essaya de la violer. Hercule le tua. Avant de mourir Nessos remis a Déjanire un flacon contenant son sang en lui disant que le liquide etait un filtre d'amour qui ramenerai Hercule lorqu'il serait infidele. Cette potion etait en fait un poison puissant, mais l'ignorant Déjanire imbiba la tunique de son mari de l'elixir. A peine Hercule eut-il revêtu le vêtement empoisonné qu'il sentit brûler ses chairs et vit son corps se consumer. Pour stopper les souffrance il fit dresser un bucher et s'y jeta dedans. Il mouru ainsi et fut admis dans l'Olympe.

Il acceda a l'immortalite en epousant Hébé et se reconcilia avec Hera.


 

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Philoctète:  Dans la mythologie Philoctète est un autre heros qui recoit les armes d'Hercule, lorsque celui ci se jette sur son bucher. Le veritable mentor de Hercule est Chiron.  il a entraine avant hercule de nombreux autres heros: Achille, Jason, Asclépios.

Achille

Autres héros grecs de la Guerre de Troie
Giuseppe Maria Crespi 1665-1747: Chiron et AchillesAchille, l'Éacide ou petit-fils d'Éaque, fils de Thétis et de Pélée, roi de la Phthiotide, naquit à Larisse, ville de Thessalie, sise sur les bords du Pénée. A sa naissance, Thétis, sa mère, l'avait plongé dans l'eau du Styx, et l'avait rendu invulnérable, excepté au talon par où elle le tenait. Elle se chargea elle-même de sa première éducation, et lui donna pour gouverneur et père nourricier Phénix, fils d'Amyntor, prince des Dolopes, réfugié à la cour de Pélée. Ensuite il eut pour maître le centaure Chiron qui, en ornant sa belle intelligence des connaissances les plus utiles, ne négligea pas de développer et de fortifier son corps. Il le nourrissait, dit-on, de cervelles de lion et de tigre, afin de lui communiquer un courage et des forces irrésistible.

Dans son enfance, sa mère lui ayant proposé d'opter entre une carrière longue et obscure, et une vie courte, mais glorieuse, il préféra la dernière. Cependant, Thétis, instruite par les oracles qu'on ne prendrait jamais Troie sans lui, mais qu'il périrait sous ses murs, l'envoya en habits de jeune fille, et sous le nom de Pyrrha, à la cour de Lycomède, roi de Scyros. À la faveur de ce déguisement, il se fit connaître de Déidamie, fille de Lycomède, l'épousa secrètement, et en eut un fils nommé Pyrrhus.

Lorsque les princes grecs se rassemblèrent pour aller au siège de Troie, Calchas leur prédit que cette ville ne pourrait être prise sans le secours d'Achille, et leur indiqua le lieu de sa retraite. Ulysse s'y rendit, déguisé en marchand, et présenta aux femmes de la cour des bijoux et des armes. Achille se trahit lui même en préférant les armes aux bijoux. Ulysse l'emmena au siège de Troie, et c'est alors que Thétis donna à son fils cette armure impénétrable, ouvrage de Vulcain.

Achille devint bientôt le premier héros de la Grèce et la terreur des ennemis. Pendant qu'Agamemnon rassemblait ses troupes, le fils de Thétis prit plusieurs villes de la Troade et de la Cilicie, entre autres Thèbes, patrie d'Andromaque. Mais dans le cours du siège, Achille ayant été d'avis de rendre la jeune Chryséis à son père, prêtre d'Apollon, et de faire cesser par là la peste qui désolait le camp des Grecs, Agamemnon offensé lui enleva une autre captive, Hippodamie, surnommée Briséis ou fille de Brisès. Cette insulte l'irrita au point qu'il se retira dans sa tente, et cessa de combattre.

Sa retraite assura la victoire aux Troyens ; mais Patrocle son ami, qui avait emprunté ses armes, ayant été vaincu et dépouillé par Hector, il demanda une nouvelle armure à sa mère, retourna au combat, et vengea la mort de son ami par celle d'Hector qu'il attacha à son char et traîna ainsi plusieurs fois autour des murailles de Troie et du tombeau de Patrocle ; il le rendit ensuite aux larmes de Priam son père.

Après la mort d'Hector, les princes grecs furent appelés chez Agamemnon à un grand festin, dans lequel ils examinèrent les moyens de se rendre maîtres de Troie. Achille se déclara pour la force ouverte, Ulysse pour la ruse, et l'avis de celui-ci l'emporta.

Suivant Ovide, l'amour causa la mort d'Achille épris des charmes de Polyxène, fille de Priam, il la demanda en mariage ; et, lorsqu'il était sur le point de l'épouser, au moment où Déiphobe l'embrassait, Pris le blessa au talon d'un coup de flèche. C'est, dit-on, Apollon lui-même, qui avait dirigé le trait. Cette blessure fut mortelle.

On a observé, avec raison, que la fable qui suppose Achille invulnérable n'était pas reçue du temps d'Homère. Ce poète n'avait garde d'adopter une fiction qui eût déshonoré son héros. Achille, selon lui, fut blessé en combattant, et les Grecs livrèrent autour de son corps un combat sanglant qui dura tout un jour. Thétis, ayant appris la mort de son fils, sortit du sein des eaux, accompagnée d'une troupe de nymphes, pour venir pleurer sur son corps. Les Néréides environnèrent le lit funèbre, en poussant des cris lamentables, et revêtirent le corps d'habits immortels ; les neuf Muses firent entendre tour à tour leurs plaintes lugubres. Durant dix-sept jours, les Grecs pleurèrent avec les déesses ; et le dix-huitième, on mit le corps sur un bûcher. Ses cendres furent enfermées dans une urne d'or, et mêlées avec celles de Patrocle. Après qu'on lui eut élevé un magnifique tombeau sur le rivale de l'Hellespont, au promontoire de Sigée, Thétis fit exécuter des jeux et des combats, par les plus braves de l'armée, autour de son tombeau.

Achille fut révéré comme un demi-dieu. L'oracle de Dodone lui décerna les honneurs divins, et ordonna que des sacrifices annuels fussent offerts sur sa tombe.

Dans les combats héroïques, le char prenait une large part à la lutte, et, par conséquent, l'habileté du cocher contribuait beaucoup à la victoire. Aussi, quand on raconte l'histoire d'Achille, on doit au moins mentionner son cocher, d'ailleurs célèbre, Automédon.

La lance d'Achille avait la vertu de guérir les blessures qu'elle avait faites ; mais il fallait toutefois que le héros y consentît.
Jason :

Le nouveau roi apprendra alors d'un oracle qu'il serait tué par un descendant d'Eole chaussé d'une seule sandale. Aeson, craignant pour la vie de son fils Jason, le confiera à Chiron auquel il demandera également de simuler ses funérailles afin d'accréditer l'idée qu'il était mort. Devenu adulte, Jason partira à lolcos pour faire valoir ses droits au trône. Il rencontrera Héra sur la route, déguisée en vieille femme, qui lui demandera de l'aide pour traverser un cours d'eau rapide. Il acceptera de lui rendre ce service malgré le désir de rejoindre rapidement la capitale de son royaume. Les flots emporteront l'une de ses sandales. Pélias sera prévenu de l'arrivée d'un inconnu sur la place du marché, avec un pied nu, qui cherchait à le rencontrer. Comprenant que l'oracle allait se réaliser, Pélias acceptera de restituer le trône à la condition que Jason rapporte auparavant la Toison d'Or. La mission lui paraissait impossible. Jason acceptera après avoir consulter l'Oracle de Delphes qui sera favorable. La Toison d'Or était la laine du bélier sur laquelle Phrixos, pour échapper aux traitements cruels de sa belle-mère Inô, avait rejoint la Colchide, à l'extrémité de la mer Noire, depuis Orchomène au Nord de la Béotie. Cette toison était suspendue dans le bois d'Arès et gardée par un serpent monstrueux qui ne dormait jamais. Aeétès, le cruel roi de Colchis, avait appris d'un oracle qu'il cesserait de régner ou qu'il mourrait de la main d'un étranger si la toison disparaissait. Il tuera ainsi son gendre Phrixos.

Les Argonautes qui devaient embarquer sur l'Argo pour partir à la conquête de la Toison d'Or, devaient être Thessaliens (Apollonios leur donne le nom de "Minyens" associé à celui d'Orchomène). La tradition dressera une liste prestigieuse de cet équipage de cinquante-six hommes, dont cinquante-quatre ramaient, par paire. Orphée, assis à l'avant, chantait pour apaiser la mer et pour donner la cadence aux rameurs tandis que Tiphys pilotait à l'arrière. La liste des Argonautes comprendra également, outre Héraclès, Calaïs et Zétos, Pélée, Télamon, Castor et Pollux (les Dioscures), Idas, Lyncée, Argos, Admète de Phères, Augias et Périclyménos. Le fils de Pélias, Acaste, se joindra à l'expédition au dernier moment. La plupart des héros possédait un don particulier. Lyncée disposait d'une vue supra normale, Jason savait attirer les femmes et épousera Médée, le don de prophétie de Mopsos permettra d'apaiser Cybèle, la force d'Héraclès permettra de vaincre les Géants à dix têtes d'Arctonnésos (I'île de l'Ours), le talent à la lutte de Pollux lui permettra de vaincre Amycos et Calaïs et Zétos, les fils ailés de Borée, parviendront à chasser les Harpyes. La figure de proue du navire construit par Argos provenait d'une branche du chêne sacré de Zeus à Dodone offerte par Athéna qui l'avait douée de parole.

L'équipage fera un sacrifice à la déesse avant le départ ainsi qu'à Apollon qui protégeait le navire. Les Argonautes feront une première escale à Lemnos dont les femmes avaient été affligées, par Aphrodite, d'une odeur insupportable. Les malheureuses, abandonnées par leurs maris, avaient fini par tuer tous les mâles de l'île. Jason sera accueilli par la reine Hypsipylé. Aphrodite acceptera de mettre un terme au fléau à la demande d'Héphaïstos. Les Argonautes séjourneront environ une année dans cette île, délai suffisant pour assurer son repeuplement. Jason s'unira à Hypsipylé à laquelle il donnera deux fils, Eunéos et Thoas. Les Argonautes traverseront l'Hellespont (du nom de Hellé, la soeur de Phrixos qui était tombée du bélier d'or), après avoir fait escale à Samothrace et pénétreront en Propontide, ou mer de Marmara. Ils jetteront l'ancre à Arctonnésos, ou l'île de I'Ours, qu'un isthme rattachait au continent. Ils seront reçus par le roi des Doliones, Cyzicos. Des Géants sortis de terre et possédant chacun dix bras, les Gégéneis (nés de la terre), attaqueront l'Argo surveillé que par le seul Héraclès. Ce dernier les exterminera et dressera un tas de leurs dépouilles, sur la plage. Les Argonautes reprendront la mer. Ils seront rejetés sur le rivage par des vents contraires très violents. Ils seront attaqués, durant la nuit, par les habitants de l'endroit qui s'avéreront être, au petit matin, les Doliones. Cizycos, qui figurait parmi les morts, aura droit à des funérailles grandioses tandis que sa femme, Clité, se pendra de désespoir.

L'expédition calmera la tempête en apaisant, sur les conseils de Mopsos, la déesse phrygienne Cybèle du mont Dindyme. Il atteindra la Bithynie. L'escale sera marquée par l'abandon d'Héraclès qui avait cassé sa rame. Il partira à la recherche de son compagnon Hylas enlevé, par les nymphes du puits dans lequel il cherchait de l'eau. Polyphème, ayant entendu les cris du jeune homme, était également resté sur place. Il fondera, par la suite, la ville de Cios. Glaucos, une divinité marine sortie des flots, dissuadera les Argonautes de récupérer Héraclès qui devait achever ses douze travaux. Les compagnons, restés à bord de l'Argo, devront affronter Amycos, le roi des Bébryces, qui défiait tous ses visiteurs à la lutte pour les tuer. Pollux, le lutteur, enfoncera le crâne d'Amycos d'un coup derrière l'oreille. Il provoquera un assaut des Bébryces qui sera facilement repoussé. Le navire fera ensuite escale à Salmydessos, capitale de la Thynie en Thrace.

Le roi Phinée, qui possédait des dons de prophétie, était devenu aveugle. Il était également recouvert d'excréments par les Harpyes envoyées par Zeus qui le punissait ainsi d'avoir découvert certains secrets concernant la race humaine. Le roi accueillera les Argonautes, leur prédira l'avenir et demandera à ses beaux-frères ailés, Calaïs et Zétès, de pourchasser les Harpyes jusqu'en Acarnanie. Les créatures seront épargnées grâce à l'intervention d'Iris mais renonceront à tourmenter Phinée. Les Argonautes partiront ensuite vers le Bosphore afin de franchir les Symplégades, les rochers qui se heurtaient violemment de chaque côté du détroit en cas de tempête. Euphème, un fils de Poséidon, qui pouvait traverser la mer sans se mouiller les pieds, devait lâcher une colombe entre les rocs afin de libérer le passage. Le navire échouera, poussé par une vague, à la jonction des rochers. Il sera aussitôt libéré par Athéna. Depuis cette date, les Symplégades ne sont plus un obstacle à la navigation. Poursuivant leur route vers la Colchide, les Argonautes feront un sacrifice à Apollon sur une île déserte de la côte de Thynie. Ils seront reçus par Lycos, le roi des Mariandynes. Le devin Idmon sera tué par le sanglier qu'il avait vu dans une prophétie. Ancée prendra le gouvernail laissé libre par la maladie et la mort de Tiphys. Dascylos, le fils de Lycos, intégrera l'équipage, rejoint à Sinope par trois Thessaliens qui avaient aidé Héraclès à combattre les Amazones.

Les Argonautes devront affronter, le long de la mythique île d'Aria, les oiseaux qui attaquaient les étrangers à l'aide de leurs plumes à l'extrémité d'acier acérée comme des flèches. Ils seront rejoints par les quatre fils de Phrixos abandonnés sur l'île après avoir fui Aeétès, le roi de Colchide qui avait tué leur père. L'escale en Colchide sera semée d'embûches. Les Argonautes remonteront le fleuve Phase jusqu'à Aea, la capitale. Jason, prévenu par l'aîné des fils de Phrixos, Arogs, et accompagné par Télamon et Augias, ira au devant du roi Aeétès pour l'informer que le seul objet du voyage était la Toison d'Or. Aphrodite, engagée par Héra, suscitera l'amour de Médée pour Jason. Persuadé qu'il allait être tué, Aeétès infligera au héros une épreuve de force et d'adresse qui consistait à atteler au même joug une paire de taureaux aux sabots d'airain, soufflant le feu par leurs naseaux. Il devait ensuite labourer un champ, semer les dents d'un dragon, et enfin tuer une moisson d'hommes armés. Argos demandera de l'aide à sa mère Chalciopé, une des filles d'Aeétès. Celle-ci donnera rendez-vous à Jason et Médée, à l'aurore, dans le temple d' Hécate, la déesse des magiciennes. La jeune fille lui donnera du baume et des conseils pour sacrifier à Hécate la nuit suivante, après avoir reçu les dents du dragon.

Jason surmontera toutes les difficultés et sortira vainqueur de l'épreuve. Médée apprendra que son père n'allait pas tenir sa promesse de donner la Toison d'Or et s'apprêtait à chasser les Grecs. Elle préviendra les Argonautes qui célébraient, au milieu de la nuit, la victoire de Jason. Médée, que Jason avait demandé en mariage en prenant Héra comme témoin, le conduira au bois d'Arès afin d'affronter le serpent qui ne dormait jamais et qui gardait la Toison d'Or. Elle endormira le monstre grâce à son pouvoir et permettra à Jason de s'emparer de la Toison avant de fuir l'embouchure du Phase à bord de l'Argo.

Le poète Pindare rapporte que le navire reviendra de Cochide en remontant le Phase, puis en longeant l'Asie et l'Afrique avant de pénétrer en Méditerranée par le détroit de Gibraltar ou par la Mer Rouge. D'autres auteurs évoquent un parcours à travers l'Europe le long du Don et d'un autre fleuve avant d'arriver à la mer Baltique, de longer la côte atlantique et de pénétrer en Méditerranée par le détroit de Gibraltar. Ovide évoque une route de retour identique à celle de l'aller. Les Argonautes retarderont la progression de la flotte d'Aeétès lancée à leurs trousses. Ils disperseront, dans les flots, les morceaux du corps de son fils Apsyrtos poignardé par sa fille Médée, qu'ils avaient pris comme otage avant de repartir. Apollonios conteste cette version et rapporte que le roi Aeétès avait envoyé Apsyrtos, déjà adulte, à la poursuite des Argonautes. Il fermera les issues de la mer Noire, y compris le Bosphore et l'embouchure de l'Ister (le Danube), en oubliant un bras plus au Nord. Cette erreur permettra aux Argonautes de rejoindre la mer Adriatique où Apsyrtos les attendait.

Jason parlementera avec lui et obtiendra de conserver la Toison d'Or en échange de la restitution de Médée. Celle-ci, qui souhaitait la mort de son frère, aidera Jason à lui tendre une embuscade et à le tuer. Les Argonautes seront cloués sur place par une tempête déclenchée par cet acte impie. Zeus leur indiquera de que Jason et Médée devaient être purifiés par Circé, la tante de Médée qui vivait à Aeaea, une île sur la côte Ouest de l'ltalie. Le navire traversera la péninsule et parviendra la mer Tyrrhénienne en remontant le fleuve Eridan (le Pô) puis en descendant le Rhône. Le couple obtiendra la purification de Circé. L'Argos poursuivra sa route vers le Sud, avec l'aide d'Héra, de Thétis et des Néréides. Il dépassera Charybde et Scylla, évitera les Sirènes et les îles Errantes avant d'accoster à Schéria, l'île des Phéaciens. Au cours du voyage, Médée viendra au secours de Jason en tuant Talos. Ce géant de bronze faisait trois fois par jour le tour de la Crète de Minos et empêchait les intrus d'aborder. Ses victimes étaient brûlées et leurs navires coulés par des projectiles ayant la forme de rochers. Médée enlèvera le clou planté dans la cheville de Talos, qui fermait son unique veine. Le monstre se videra de son sang.

Une légende rapporte que Médée rajeunira Aeson, le père de Jason, lorsque les Argonautes arriveront à Iolcos. Elle utilisera ses dons de magicienne et elle versera, dans les veines du vieillard, une potion miraculeuse composée d'herbes. Une version différente prétend qu'elle le fera bouillir dans un chaudron pour obtenir un résultat identique. Elle persuadera les filles de Pélias, l'oncle de Jason qui avait usurpé le trône, de procéder de même avec leur père, après l'avoir découpé en morceau. Pour les convaincre, elle fera une démonstration avec un vieux bélier. Ce parricide livrera la ville d'Ioclos aux Argonautes. Jason et Médée, abandonnés par Héra qui désapprouvait le crime, devront quitter Iolcos. Ils s'exileront en Corinthe où, selon une tradition, Médée possédait certains droits. Son père Aeétés avait régné autrefois dans cette ville et avait scellé une alliance entre les deux cités. Jason confiera le pouvoir à Acaste, le fils de Pélias. D'autres auteurs racontent que Jason sera chassé par les habitants d'Iolcos, après le meurtre sauvage de Pélias. Il trouvera refuge, avec Médée, à la cour du roi Créon, à Corinthe. Héra, qui n'avait plus besoin de lui, l'abandonnera. Jason et Médée vivront dix ans dans la cité et donneront naissance à plusieurs garçons parmi lesquels Thessalos, Alcimédés, Tisandros, Merméros, Phérés et Médéios ainsi qu'à une fille, Eriopis.

Créon offrira alors la main de sa fille, Glaucé, à Jason qui devait répudier Médée. Cette dernière ne pouvait, en tant qu'étrangère, épouser légitimement un Grec. Elle sera bannie de Corinthe. Jason, pour concilier les bonnes grâces de Créon, le roi de Corinthe, divorcera de Médée pour épouser sa fille. Médée se vengera. Elle demandera à ses enfants d'apporter à la jeune femme une robe de mariée qui brûlera vive Glaucé. Les enfants de Jason et de Médée seront assassinés cette dernière, ou exécutés par les Corinthiens en représailles. Jason n'aura plus d'héritier. Certaines versions retiennent que son fils Thessalos survivra et succèdera à Acaste sur le trône d'Iolcos. Créon, qui tentait de secourir Glaucé, périra dans l'incendie. Médée s'enfuira de Corinthe sur le char d'Hélios, tiré par des dragons ailés. Elle se rendra à Athènes. Le roi Egée avait juré de la protéger contre la promesse de pouvoir avoir des enfants. Il ignorait alors qu'il avait engendré Thésée. Médée l'épousera et lui donnera un fils, Médos. Thésée, devenu adulte, reviendra à Athènes pour faire valoir ses droits au trône. Médée découvrira vite l'origine royale de Thésée et proposera à Egée de l'envoyer combattre le taureau de Minos qui ravageait Marathon. Elle tentera de tuer le jeune homme, lorsque celui-ci reviendra victorieux, en lui offrant une coupe de poison. Egée reconnaîtra alors certains objets que la mère de Thésée, Aethra, avait donnés à son fils. Il lui arrachera la coupe des mains. Médée partira en exil, en Colchide, et y retrouvera son fils Médos.

Persès, qui avait tué son frère Aeétès et s'était emparé du trône, jettera l'enfant en prison. Un oracle lui avait prédit qu'un descendant d'Aeétès devait le tuer. Médos protestera et prétendra être un Corinthien du nom de Hippotès, fils de Créon. Le pays de Colchide sera frappé de sécheresse. Médée, déguisée en prêtresse d'Artémis, proposera à Persès d'enrayer le fléau si elle pouvait accomplir des rites qui entraînerait la mort du garçon. Elle découvrira, au milieu de la cérémonie, que le jeune homme était son fils, Médos. Elle lui remettra une épée avec laquelle il tuera Persès, vengeant ainsi son grand-père Aeétès. D'après certaines versions, Médos montera sur le trône et s'emparera du pays des Mèdes (Médie) auquel il donnera son nom.

On ne sait rien de la mort de Médée. Jason décédera alors qu'il se reposait à l'Ombre de son vieux bateau, à Corinthe. Un élément de la carcasse du navire, peut-être la proue aux dons prophétiques qui venait de Dodone, se brisera et tuera Jason dans sa chute. La légende de Jason a inspiré Pindare, Euripide et Apollonios de Rhodes.



Après la guerre de Troie, Ulysse rentre vers Ithaque, son royaume. Mais son voyage de retour est émaillé de multiples aventures.

       Un soir, ils accostent près d'une côte montagneuse. Avec dix hommes, Ulysse part en exploration. Ils croisent un troupeau de moutons mené par un géant. Mêlés aux moutons, ils entrent tous dans une grotte. Le géant bloque l'entrée avec un rocher. Ulysse et ses compagnons sortent alors de leur cachette, et demande l'hospitalité. Mais le Cyclope, Polyphème (fils de Poséidon) se rue alors vers eux et tue et mange deux des compagnons. Repu, le géant s'endort. Le lendemain, il en tue deux autres, avant de partir avec ses moutons, non sans avoir bloqué à nouveau l'entrée.

       Entre temps, Ulysse prend la massue du géant, l'aiguise pour en faire un pieu géant. Le soir, quand Polyphème revient, Ulysse lui offre du vin. Le géant lui demande son nom, Ulysse de répondre "Personne est mon nom". Puis, Ulysse et ses hommes saisissent le pieu, et l'enfonce dans l'oeil du géant. Il hurle, ameutant les autres Cyclopes. "C'est Personne qui me tue" dit-il. Et tous s'en vont. Dans sa colère, Polyphème déplace le rocher qui obstrue l'entrée, hurlant qu'il tuera tous ceux qui tenteront de la franchir. Ulysse et ses compagnons s'accrochent aux moutons et sortent sans être inquiétés. Mais pour avoir attaqué Polyphème, Ulysse s'attirera la haine de Poséidon.
Homère, Odyssée, IX


Ulysse menace Circé avec son glaive
         Le navire d'Ulysse approche d'une île boisée. Quelques hommes partent en reconnaissance. Ils découvrent la demeure de la magicienne Circé. Celle-ci leur offre l'hospitalité, et leur fait boire un philtre malfaisant. Les hommes sont alors transformés en pourceaux. Toutefois, l'un d'entre eux, Euryloque, ayant pressenti le piège, part prévenir Ulysse. Ce dernier croise en chemin Hermès qui lui donne des herbes magiques. En arivant chez Circé, celle-ci lui offre également l'hospitalité. Ulysse boit le philtre, mais il ne se passe rien. Elle le touche de sa baguette, mais il ne se passe rien. Ulysse prend alors son glaive, et la menace. La magicienne rend alors forme humaine aux compagnons. Tous passeront chez elle une année à festoyer.
Homère, Odyssée, X


       Quand il la quitte, Circé met Ulysse en garde contre les sirènes, dont le chant attire les marins, provoque les navires vers les éccueils. Aussi, pour ne pas être attiré, Ulysse prend un morceau de cire qu'il découpe. Chaque marin se bouche les oreilles avec, et ignore ainsi les chants.

       Ayant évité les sirènes, et les îlots rocheux, il approche de la caverne de Scylla, la terrible aboyeuse. Ses douze pieds ne sont que des moignons ; sur ses six cous géants, six têtes effroyables ont, chacune en sa gueule, trois rangées de dents serrées... C'est un mal éternel, un terrible fléau, un monstre inattaquable.
Homère, Odyssée, XII

       Enfin, il arrive à Ithaque. Pénélope, sa femme, l'attend depuis des années. Les seigneurs de l'île souhaitent l'épouser. Elle imagine une ruse pour gagner du temps. Elle déclare qu'elle doit tisser le linceul de Laerte, père d'Ulysse. Pendant trois années, elle fait et défait son ouvrage. Mais les seigneurs la surprennent et l'oblige à fournir son ouvrage.
       Entre temps, Télémaque, parti à la recherche de son père, le découvre à son retour, dissimulé sous des haillons. Avec l'aide d'Athéna, le père et le fils massacrent les prétendants réunis dans la salle des banquets.
 
Pénélope faisant son ouvrage

       Quand il retrouve sa femme, celle-ci a du mal à le reconnaitre. Argos, son chien le reconnaît de suite. Aussi, Pénélope demande-t-elle de préparer un lit dans la chambre conjugale. Indigné, Ulysse lui demande pourquoi ne peut-il pas dormir dans le lit qu'il avait lui-même taillé dans un tronc d'olivier. Aussitôt reconnu, Pénélope l'enlace.
Homère, Odyssée, XIII à XXIV
 






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