
Zeus, souvent appelé "fils de Cronos", est le principal dieu du panthéon grec. Mais il n'en a pas toujours été ainsi.
Zeus et Thétis par Ingres : inspiré de l'Iliade, ce tableau montre Thétis demandant à Zeus d'honorer son fils Achille.
le grand Jupiter, qui leur accorde à son gré la honte ou la gloire, les élève aisément ou aisément les renverse, affaiblit le puissant et fortifie le faible, corrige le méchant et humilie le superbe, Jupiter qui tonne dans les cieux et réside sur les plus hauts sommets de l'Olympe. Dieu puissant qui entends et vois tout, écoute : dirige vers l'équité les jugements des mortels. Hésiode, Théogonie
Déjà, dans l'un plus vieux textes, l'Iliade, Homère nous dresse un portrait saisissant de Zeus : maître des dieux et des hommes, il règne du sommet enneigé du mont Olympe, entouré de nombreuses autres divinités. Pourtant, même si tous, hommes et dieux, le craignent et doivent, parfois contre leur volonté, accepter ses décisions, il n'est pas le maître absolu de l'univers, mais le gardien d'un ordre qu'il a contribué à établir en chassant du pouvoir les Titans, symboles d'une force brutale et sans tabous. Zeus respecte notamment les Moires (ou Parques selon la terminologie latine) qui fixent la durée de la vie de chacun, la Justice, la parole donnée (bien qu'il soit plutôt du côté des Troyens, il donnera la victoire aux Grecs à l'issue de la guerre de Troie, comme il l'avait promis à son épouse Héra).
Autre description saisissante tirée de l'Iliade, celui de son union plutôt orageuse avec Héra, sa soeur. Homère nous la décrit comme une déesse acariâtre, insatisfaite, revendicatrice. Si Zeus lui promet la ruine de Troie (Aphrodite avait été jugée plus belle que Héra et qu'Athéna par le prince troyen Pâris, et celles-ci avaient juré vengeance), c'est, semble-t-il, par lassitude face à ses récriminations incessantes.
Deux épisodes, brièvement contés dans l'Iliade, font état de cette union orageuse.
Un jour, Héra, Poséidon, Athéna, et sans doute d'autres divinités, voulurent enchaîner Zeus. Ce fut Thétis, mère d'Achille, qui le sauva : elle partit chercher Briarée, le géant aux cents bras (voir la page Au commencement de notre Cosmogonie). Il s'assit près de Zeus, et les autres dieux de l'Olympe en eurent peur, si bien qu'ils renoncèrent à leur projet.
C'est peut-être à la suite de ce complot que Zeus suspendit Héra "dans l'éther et les nuages", par une chaîne d'or, et des enclumes étaient attachées à ses pieds. Mais aucun dieu n'osa libérer Héra, sous peine d'être jeté par Zeus sur la terre du haut de l'Olympe.
Zeus ne fut pas toujours le maître : d'autres divinités avant lui régnèrent sur le cosmos. On connaît l'histoire de sa naissance et la manière dont il pris le pouvoir de son père le Titan Cronos.
Hésiode, Théogonie :
Ce roi des Immortels choisit pour première épouse Métis (51), la plus sage de toutes les filles des dieux et des hommes. Mais lorsque Métis fut sur le point d'accoucher de Minerve déesse aux yeux bleus, Jupiter, l'abusant par de flatteuses paroles, la renferma dans ses propres flancs, selon les conseils de la Terre et d'Uranus couronné d'étoiles, qui voulaient empêcher qu'au lieu de Jupiter, un autre des dieux immortels s'emparât de l'autorité souveraine ; car, suivant l'arrêt du Destin, Métis devait lui donner des enfants fameux par leur sagesse : d'abord la vierge aux yeux bleus, Minerve Tritogénie, égale à son père en force et en prudence, puis un fils qui, rempli d'un superbe courage, deviendrait le roi des dieux et des mortels. Jupiter prévint un tel malheur en cachant Métis dans ses flancs, afin que cette déesse lui procurât la connaissance du bien et du mal.
Ensuite il épousa la brillante Thémis ; Thémis enfanta les Heures, Énomie, Dicé, la florissante Irène, qui veillent sur les ouvrages des humains, et les Parques, comblées par Jupiter des plus rares honneurs, Clotho, Lachésis et Atropos, qui dispensent aux hommes et les biens et les maux. La fille de l'Océan, Eurynome, douée d'une beauté ravissante, conçut de Jupiter trois Grâces aux belles joues, Aglaia, Euphrosyne et l'aimable Thalie. L'amour, qui amollit les âmes, semble émaner de leurs paupières, et leurs yeux ont des regards pleins de charmes.
Cérès, cette nourrice du monde, laissa Jupiter entrer dans sa couche et engendra Proserpine aux bras d'albâtre, Proserpine que Pluton ravit à sa mère et que le prudent Jupiter lui permit de posséder.
Jupiter aima encore Mnémosyne à la belle chevelure, qui enfanta les neuf Muses aux bandelettes d'or, les Muses sensibles aux plaisirs des festins et aux douceurs du chant.
Latone (52), unie d'amour avec le maître de l'égide, fit naître Apollon et Diane chasseresse, ces deux enfants les plus aimables de tous les habitants du ciel.
Enfin Jupiter eut pour dernière épouse l'éclatante Junon, qui mit au jour Hébé, Mars et Ilithye après avoir partagé la couche du roi des dieux et des hommes. Mais il fit sortir de sa propre tête Tritogénie aux yeux bleus, cette terrible Pallas, ardente à exciter le tumulte, habile à guider les armées, toujours infatigable, toujours digne de respect, toujours avide de clameurs, de guerres et de combats.
Zeus ne fut pas toujours marié avec Héra. Il eut avant elle plusieurs aventures avec des divinités pré-olympiennes : Océanides, Titanides...
La première, qui l'aida à prendre le pouvoir, fut Métis, dont certains disent qu'elle fut une Titanide (donc, tante de Zeus) et d'autres une Océanide, fille d'Océan et de Téthys. Lorsqu'elle fut enceinte de Zeus, un oracle prédit que la premier enfant qui naîtrait de Métis serait une fille, et que le second prendrait le pouvoir. Zeus, aussitôt, avala Métis. Lorsque le terme arriva, Zeus fut pris d'un violent mal de tête et demanda à Héphaïstos de la soulager. Celui-ci, d'un coup de massue, fendit le crâne de Zeus et s'en échappa, armée et casquée, la déesse Athéna. Mais, du fond des entrailles de Zeus, Métis continuait à lui dispenser des conseils quant au bien et au mal.
La seconde, la Titanide Thémis ("justice"), lui donna les Heures et les terribles Moires (ou Parques, selon la terminologie romaine).
Les Heures sont au nombre de trois : Eunomie, Dikè et Eiréné, dont les noms signifient Discipline, Justice et Paix. Elles représentaint à la fois les saisons et une forme d'ordre social. En fait, le terme d'"Heures" vient d'une mauvaise traduction latine : leur nom grec est "Horas", qui signifie "Saisons".
Les Moires, ou "Destinées", appelées le plus souvent "Parques", sont les terribles divinités qui filent et coupent le fil ténu de la vie des hommes.
De sa troisième compagne Eurynomé, l'Océanide, il eu les Grâces.
Il s'unit ensuite à Mnémosyne, la Mémoire, qui lui donna les 9 Muses.
Ensuite, c'est à Létô, issue de la descendance des Titans, qu'il s'unit et il en eut Apollon et Artémis.
Enfin, il s'unit à Héra "aux bras blancs", sa soeur, qui lui donna Arès, Hébé et Ilythie.
Ce sont là les unions citées par Hésiode dans sa Théogonie, unions desquelles naquirent des être immortels. Selon Homère, Aphrodite aussi serait la fille de Zeus, qu'il aurait eue de son union avec Dioné, une créature pré-olympienne dont on ne sait si elle fut une Titanide ou une Océanide.
Il eut encore de nombreuses liaisons, cette fois avec des mortelles, mais, seul parmi les enfants issus de ces unions, Héraclès parvint à l'immortalité. Les plus célèbres d'entre elles sont celles qu'il eu avec Io, Europe et Danaé.
Poséidon sur son char, mosaïque conservée au musée de Sousse en Tunisie
Poséidon est, avec Zeus et Hadès, l'un des trois fils de Cronos et de Rhéa, les Titans qui règnèrent sur l'univers avant que leurs fils prennent le pouvoir.
Poséidon s'est vu offrir en partage la domination de la mer, et il est devenu le dieu marin par excellence. Il n'en a pas toujours été ainsi.
Nommé par Homère comme par Hésiode "l'ébranleur de la terre", Poséidon a tout un passé "terrestre". Comme ses soeurs et son frère Hadès, il fut dévoré à sa naissance par son père, avant d'être libéré par Zeus grâce aux conseils de Métis (voir notre page Cosmogonie). Mais on dit aussi que Rhéa donna à Cronos un poulain enveloppé de langes à la place de l'enfant, et que c'est le poulain que Cronos engloutit.
Et Poséidon le "terrestre" est lié au cheval. C'est sous la forme d'un étalon qu'il s'unit à Déméter, qui s'était cachée de lui en se métamorphosant en jument, alors qu'elle était en train de chercher sa fille, enlevée par Hadès. De cette union naquirent deux enfants, une fille, une déesse mystérieuse que l'on ne doit pas nommer (et que certains, pourtant, nomment Despoena), et un cheval sauvage, Aérion. A la Gorgone Méduse, il donna aussi deux enfants, un fils, Chrysaor, et un cheval, Pégase.
Mais ce ne sont pas que de chevaux qu'il fut père : il semble bien qu'après Gaïa, dont on connaît la descendance monstrueuse, il engendra plusieurs créatures étranges, dont certaines furent terribles, comme le cyclope Polyphème, qui dévora tant de compagnons d'Ulysse. Mais certaines de ces créatures furent bienveillantes, comme le bélier d'or qui sauva Phryxos du sacrifice. C'est ce bélier qui donna la fameuse Toison d'Or.
Poséidon revendiqua de nombreuses villes, et toujours en compétition avec un autre dieu ou une déesse, et presque toujours à son désavantage. Lorsqu'il revendiqua Athènes et la région alentour, l'Attique, il planta son trident au milieu de l'Acropole, et il en surgit un lac d'eau salée, qui se trouvait encore dans l'Erechthéion à l'époque classique. Mais lorsqu'Athéna offrit à la ville le premier olivier, l'Attique lui revint, et Poséidon en conçut une grande colère.
Colère et chevaux fougueux, voilà le visage de Poséidon le terrestre, qui trouvera une certaine harmonie dès qu'il tournera sa domination vers la mer. Il devint, enfin, dieu tutélaire de l'île légendaire d'Atlantide, dont le l'organisation (tout aussi légendaire) devint un modèle pour la Grèce.
Après avoir courtisé la Néréide Téthis, il épousa finalement Amphitrite, une autre Néréide. Il ne semble pas qu'Amphitrite ait chercher à se transformer pour échapper à Poséidon, mais qu'elle se soit simplement retirée dans les montagnes de l'Atlas. Poséidon, ensuite, envoya son ami Delphinos plaider sa cause, et Amphitrite accepta les noces. Elle lui donna 3 enfants, Triton (voir la page Athéna) ("D'Amphitrite et du bruyant Neptune naquit le grand et vigoureux Triton, dieu redoutable qui, dans les profondeurs de la mer, habite un palais d'or auprès de sa mère chérie et du roi son père." Hésiode, Théogonie), Rhodé, nymphe de l'île de Rhodes qui épousa Hélios (mais certains font de Rhodé la fille d'Aphrodite, ou bien la fille de Poséidon avec Halia, l'une des Telchines qui l'avait élevé), et Benthésicymé, qui habita sur la côte éthiopienne.
Le mariage ne modifia pas la nature aventureuse de Poséidon, qui continua de courtiser mortelles et immortelles. Amphitrite, de nature pourtant paisible, se vengea pourtant cruellement de Scylla que Poséidon avait courtisée. Elle jeta une certaine herbe dans le lac où se baignait la Phorcyde, et celle-ci se transforma en monstre, terreur des marins. Poséidon eut de nombreuses amantes et une descendance tout aussi nombreuse, parfois monstrueuse.
Il règne sur les mers de son palais merveilleux situé au fond des eaux. Dans l'iconographe antique et classique, on représente Poséidon sur son char marin, trainé par des chevaux ou des êtres mi-chevaux, mi-poissons, accompagné ou non de son épouse et de toute une suite de créatures marines.

Athéna est née au bord du lac Tritonis, lac du dieu Triton.
Autrefois, un grand lac salé occupait une grande partie de ce que l'on appelle aujourd'hui la Tunisie. Ilse jetait dans la Mediterranée au niveau du Golfe de Gabès. De ce lac légendaire, que les Grecs nommaient lac Tritonis en l'honneur du dieu Triton qui le gouvernait, il ne reste qu'une vaste étendue de sel au milieu du sable, le Chott-el-Jerid, dans la région de Gafsa et de Tozeur.
La côte nord-ouest de l'Afrique se nommait la Lybie et il semble qu'une importante communauté lybienne se soit installée en Grèce dans un lointain passé.
Triton était un dieu marin, tels Pontos, Nérée, Thaumas et Phorcys, dont beaucoup font partie de la descendance "monstrueuse" de Gaïa et sont liés aux époques "barbares", avant la prise de pouvoir par Zeus, ce qui signifie que ces divinités sont très anciennes. Triton, lui, passe pour être un enfant de Poséidon, frère de Zeus, et d'Amphitrite, comme le dit Hésiode. Pourtant, il paraît certain que ces divinités marines furent, à l'origine, les divinités tutélaires des diverses tribus qui vivaient autour ou au coeur - les îles - de la Mediterranée.
Les légendes les plus courantes font d'Athéna la fille de Zeus. Cependant, cette interprétation, comme on le verra, est tardive et pose des problèmes de chronologie. Mais elle est bien commode, car elle établit un lien puissant de vassalité entre la digne et sage déesse et son "supérieur" Zeus, souvent bien moins sage et bien moins digne.
D'autres légendes font d'Athéna la fille d'un certain Pallas, un géant ailé au corps de bouc, qu'elle massacra alors qu'il tentait d'abuser d'elle. Elle lui arracha la peau, s'en fit une égide et accola son nom au sien, devenant Pallas Athéna.
Mais, selon d'autres légendes, Pallas était la fille de Triton (ce qui serait appuyé par l'épithète de "Tritogénie" dont on qualifie Athéna), et certains font de Pallas et d'Athéna une seule et même déesse, mais d'autres font de Pallas la compagne de jeux d'Athéna que celle-ci tua accidentellement. On attribue à Triton une autre fille, Tritéia, qui fut une prêtresse d'Athéna.
Des légendes peu claires relient également Athéna à la Phtiotide, région de la Grèce antique située au fond de l'actuel golfe de Lamia et qui était la région de Phthie, dont Pélée deviendra le roi. Ces légendes font d'Athéna la fille du roi Itonos, et elle tua sa soeur Iodama en lui montrant la tête de la Gorgone. Mais, selon d'autres légendes, Athéna n'était pas la fille d'Itonos et Iodama était une prêtresse d'Athéna (et fille d'Itonos).
Pour reprendre les réflexions de Robert Graves, il semblerait donc que ces légendes anciennes témoignent d'une passation de pouvoir (a priori pacifique) du "père" Tritonis vers sa "fille" Athéna (ou Neith...), et que l'on soit passé, à une époque reculée, du patriarcat au matriarcat. Des traditions encore vivaces en Afrique du Nord le confirmeraient.
Athéna, ou Neith, étant déesse tutélaire du grand peuple lybien dont une importante communauté s'établit en Grèce, il fut difficile aux prêtres de Zeus de minimiser, comme ils le firent pour de nombreuses divinités, l'importance d'Athéna. Ainsi, elle devint la fille aînée et préférée de Zeus, qui alla même, comme le dit la légende, jusqu'à l'enfanter.
Avant d'épouser sa soeur Héra, Zeus eut plusieurs épouses et de nombreuses concubines. La première de ces épouses fut Métis, nom qui signifie Prudence, une titanide, fille du Ciel et de la Terre. Ce nom à forte teneur philosophique, qui préfigure la sagesse de la future Athéna, nous fait soupçonner une divinité "de circonstance", d'invention tardive.
Zeus s'unit à Métis, qui fut enceinte d'Athéna. Mais, selon l'oracle de Gaïa, la terre-mère, Métis devait enfanter une fille et son second enfant serait un garçon qui deviendrait plus grand que son père. Zeus, jaloux de sa puissance, avala son épouse et, lorsque le moment d'enfanter fut venu, il fut pris d'un furieux mal de tête et demanda à Héphaïstos (selon d'autres auteurs, il s'agissait de Prométhée) de lui fendre le crâne d'un coup de marteau. Alors, Athéna surgit du crâne de Zeus, armée et casquée, en poussant un cri terrible. Il semble que la mythologie soit en conflit avec sa propres chronologie : Héphaïstos était le fils de Zeus et de Héra, qui s'unirent bien après la naissance d'Athéna, ou même d'Héra seule, sans l'aide d'aucun mâle, qui l'aurait enfanté par dépit après la naissance d'Athéna.
Athéna, qui combattit avec Zeus et le conseilla au moment de la guerre contre les Titans, fut surnommée "Promachos", "celle qui combat en première ligne". Elle fait partie des 12 dieux olympiens. Dans l'Odyssée, pour appuyer l'importance de leurs dires, il est fréquent que les héros de l'histoire s'exclament : "Zeus père, Athéna, Apollon !"
Athéna, qui est sans doute très belle comme toutes les déesses, bien qu'un peu sévère, n'est pas, contrairement à Aphrodite, susceptible sur le plan de la beauté. Pourtant, elle participa au "concours de la pomme" : lors des noces de Pélée et de Thétis, la déesse de la discorde Éris fit rouler une pomme d'or, où étaient gravés les mots "à la plus belle", aux pieds d'Héra, d'Athéna et d'Aphrodite qui devisaient ensemble. Elles choisirents Pâris, le prince troyen, comme juge, et celui-ci élit Aphrodite, qui lui promit en échange l'amour de la plus belle femme du monde, la belle Hélène, reine de Sparte. C'est l'objet de l'un des plus beaux ouvrages lyriques français, et peut-être le plus drôle, la Belle Hélène d'Offenbach.
Mais le rire sera de courte durée, car cet épisode sera la cause de la guerre de Troie : Pâris enlèvera Hélène et les Grecs partiront en guerre contre Troie pour la récupérer. Héra, et surtout Athéna, se prirent de haine pour Pâris et pour toute la cité de Troie et, lors de la guerre qui suivit, les deux déesses intervinrent constamment dans le cours des évènement, Héra depuis l'Olympe en tentant d'influencer Zeus et Athéna, sur le champ de bataille, au milieu des combats, pour ruiner les Troyens.
Pourtant, Athéna se retourna contre un Grec au cours du sac de Troie : Ajax, qui était à la fois vaillant et cruel, viola la princesse et devineresse Cassandre dans le temple même d'Athéna où elle s'était réfugiée. Elle submergea tous les vaisseaux d'Ajax lorsqu'il rentra chez lui et, empruntant sa foudre à Zeus, elle foudroya le héros sur le rocher où il se réfugia après avoir échappé au naufrage.
Plus tard, elle assistera en permanence Ulysse lors de son long périple qui le ramena de Troie à son île d'Ithaque.
Oui, revenons à ce bon vieil Hésiode, auteur de la Théogonie où est exposée de manière poétique la création de l'univers et la généalogie de tous les immortels. Il cite Athéna quatre fois :
- d'abord, en exergue, au tout début du poème, pour "attirer la bienveillance" des dieux sur son travail. Il appelle d'abord les muses, inspiratrices, auxquelles appartiennent toutes les créations de l'esprit, ensuite Zeus et son épouse Héra, et juste ensuite, Athéna aux yeux "glauques" (voir l'explication plus bas dans cette page), et avant Apollon et sa soeur "Artémis la chasseresse, Poséidon, frère de Zeus, qui entoure et ébrale la terre, la vénérable Thémis, Aphrodite à la noire paupière, Hébé à la couronne d'or, la belle Dioné, Eôs l'Aurore, le grand Hélios le Soleil... ",
- lorqu'il expose la généalogie des monstres nés d'Echidna et de Typhon ; c'est Athéna qui donna des conseils Héraclès pour vaincre l'Hydre de Lerne,
- lors de la création de Pandore par les dieux, elle pare la première femme d'une "blanche tunique", d'un "voile ingénieusement façonné, admirable à voir", de gracieuses guirlandes de fleurs fraîches et d'une couronne d'or forgée par Héphaïstos,
- enfin, il décrit la naissance d'Athéna, en tant que fille de Zeus et de la Titanide Métis.
Athéna devint déesse tutélaire d'Athènes, cité à laquelle elle donna son nom, ainsi que l'olivier, symbole de la paix, mais surtout source de prospérité, quand on sait l'importance, pour l'économie antique, de l'huile d'olive, qui était utilisée pour l'éclairage.
Le roi Cécrops de l'Attique, qui est la région d'Athènes, cherchait un nom pour la ville qu'il venait de bâtir. Poséidon et Athéna s'affrontèrent pour sa souverainté : celui qui ferait à cette cité le plus beau présent serait le vainqueur. Athéna offrit l'olivier : à l'époque historique, on dit que les oliviers qui poussaient sur l'Acropole d'Athènes étaient les rejetons de ce présent divin. Poséidon frappa les rochers, et aussitôt jaillit un lac d'eau salée. Mais d'autres légendes parlent d'un magnifique cheval noir. Mais, que ce fût un cheval ou un lac d'eau salée, un jury composé de 12 dieux donna la victoire à Athéna. Ce qui rendit Poséidon fou de colère.
Gaïa présentant à Athéna l'enfant Erechtonios sous les yeux du roi-serpent Cecrops
"Athènes, ville bien bâtie, le pays d'Érechthée au grand cœur, qu'Athéna fille de Zeus avait jadis élevé, et qu'avait enfanté la terre porteuse de froment. La déesse avait ensuite établi Érechthée dans Athènes, dans son temple opulent, et là, au retour des années, les jeunes Athéniens se le rendaient propice par des taureaux et des agneaux." Homère, l'Iliade
Athéna, déesse vierge (car, si elle avait enfanté, nul doute que son enfant aurait dépassé en force et en sagesse Zeus lui-même), eut pourtant un fils adoptif dont elle s'occupa.
Un jour qu'elle visitait la forge d'Héphaïstos, celui-ci se prit de désir pour la déesse et tenta de s'unir à elle. Comme elle s'écartait de lui, un jet de semence toucha sa jambe. Dégoutée, elle prit un morceau de laine, s'essuya et le jeta. Aussitôt que le tampon de laine toucha la terre, un enfant naquit, Érechtonios (ou Érechtée, selon les traductions), un être peut-être encore plus laid que son père.
Athéna confia la garde de l'enfant aux trois filles du premier roi d'Athènes et fondateur de la cité, Cécrops, le roi-serpent, avec interdiction d'ouvrir la corbeille où il était enfermé. Mais la curiosité fut la plus forte et, et les trois filles, après avoir jeté un regard dans la corbeille, furent affolées par la laideur du monstre au point de se précipiter du point le plus haut et le plus escarpé de l'Acropole, où se dressait alors la citadelle d'Athènes.
Sur l'illustration, à gauche, on distingue la Terre-Mère Gaïa qui tend à Athéna le petit Érechtonios, en présence du roi-serpent Cécrops. Un temple de l'Acropole, l'Erechtéion, lui est consacré.
Athéna est accompagnée d'une chouette, symbole d'intelligence (la chouette voit la nuit), et Homère, dans l'Iliade, la qualifie de déesse aux yeux "glauques", mot qui a donné lieu à plusieurs interprétations : yeux de chouette ("glaux, glaucos", la chouette, en grec), yeux bleus ou bleu-vert (couleur que l'on nomme également "pers"), yeux brillants. C'est cette dernière traduction que l'on retient maintenant, bien que la première s'accorde bien au symbole d'Athéna, la chouette, et que la seconde confirme les origines "berbères" de la déesse.
Armée, casquée, munie d'une lance et protégée par l'Égide, Athéna, déesse de la sagesse, apparaît aussi comme une déesse guerrière. Elle appuie les Grecs au cours de la guerre de Troie et Zeus accorde la victoire à ceux qui sont soutenus par sa fille préférée. L'intelligent Ulysse, pourtant à la merci de la mer et de Poséidon qui le déteste, finira par rentrer chez lui grâce à l'aide d'Athéna, qui n'hésite pas à descendre sur terre, sous une apparence humaine, pour inspirer Ulysse ou son fils Télémaque.
Mais qu'est-ce que l'Égide ? Le mot grec "aegis" désigne d'abord le peaux d'animaux dont se couvraient les guerriers, aux époques les plus reculées : elles étaient justes tannées, et on les portait dans le dos, nouées autour du coup par les deux pattes de devant de l'animal. En ce qui concerne Athéna, cet "animal" était la Gorgone, que tua Persée. Et on a vu qu'elle pourrait être aussi être la peau du dieu-bouc Pallas. Zeus porte aussi une égide, faite de la peau de sa chèvre-nourrice Amalthée (il attendit qu'elle meure avant de la dépecer...).
Lorsqu'évolua l'art de la guerre et celui de la métallurgie, et quand les guerriers commencèrent à porter des armures, on continua d'employer le mot "aegis" pour les désigner. Elle s'ornèrent de motifs gravés, et l'on représente Athéna, traditionnellement, avec une armure où est sculptée la tête de la Gorgone, et où sont figurés les serpents de ses cheveux.
On avait consacré des temples à Athéna dans toute la Grèce. Ceux-ci étaient servis par des jeunes filles vierges. Outre Athènes, bien sûr, et le Parthénon, elle avait notamment des temples à Mycènes, à Tégée en Arcadie, à Chalcioecon en Macédoine... sans compter bien sûr le légendaire temple d'Athéna qui se trouvait à Troie et dans lequel les Troyens firent entrer le fameux cheval de bois. Le temple d'Athéna à Troie abritait une fameuse statue de la déesse, le Palladium. Dans le temple de Mycènes, on rendait des oracles. Selon la légende, c'est Apollon qui reçut de Gaïa les dons oraculaires, mais il n'en avait, semble-t-il, pas le monopole.
Les principales fêtes consacrées à Athéna étaient les Panathénées. Elles se déroulaient à Athènes, tous les ans pour les Petites Panathénées, et tous les cinq ans pour les "Grandes". Elles faisaient venir d'Attique de nombreux voyageurs et donnaient lieu à des joutes sportives et musicales, ainsi qu'à un banquet. Lors des Grandes Panathénées, les jeunes filles d'Athènes promenaient dans la ville le Peplos, ou voile brodé exécuté par les femmes d'Athènes durant l'année, pour le porter à la statue d'Athéna Polias. On peut voir dans les musées d'Europe, en particulier au British Museum, des frises sculptées, sorties des ruines du Parthénon, et représentant les défilés des Panathénées.
Fille de Zeus ou de Cronos, Aphrodite, déesse de l'amour, inspira la passion amoureuse aux mortels comme aux dieux. Sans doute à l'origine une divinité orgiaque de la fertilité venue du Proche-Orient, elle est devenue, en abordant les îles grecques, la douce déesse de l'amour et des plaisirs.
La version a plus captivante de la naisance d'Aphrodite nous vient de la Théogonie d'Hésiode.
Lorsque Cronos, armé par sa mère Gaïa-la-Terre de la faucille de fer, castra son père, des gouttes de sang tombèrent sur le ventre de sa mère la Terre et les trois déesses de la vengeance, les Erynnies, naquirent de ce sang. Puis il lança au loin le sexe de son père qui retomba au milieu de la mer (certains parlent du cap Drepanon au nord-ouest de la Sicile, au pied du mont Eryx). Les vagues entourèrent le sexe du dieu et l'écume se mêla à la semence. Il en naquit Aphrodite, la blonde déesse, "à la belle couronne", comme la qualifie Homère. Le nom d'Aphrodite signifie "née de l'écume de la mer".
Emportée par Zéphyr, elle toucha l'île de Cythère, dont le nom, de nos jours encore, évoque les plaisirs, puis gagna l'île de Chypre. Sous ses pieds, l'herbe grandissait. Elle était accompagnée de l'Amour et du Désir. Du nom des deux îles qu'elle aborda, on l'appelle parfois Cythérée ou Cyprogénie.
Voici comment Hésiode la dépeint :
"Cronos mutila de nouveau avec l'acier le membre qu'il avait coupé déjà et le lança du rivage dans les vagues agitées de Pontus : la mer le soutint longtemps, et de ce débris d'un corps immortel jaillit une blanche écume d'où naquit une jeune fille qui fut d'abord portée vers la divine Cythère et de là parvint jusqu'à Chypre entourée de flots. Bientôt, déesse ravissante de beauté, elle s'élança sur la rive, et le gazon fleurit sous ses pieds délicats. Les dieux et les hommes appellent cette divinité à la belle couronne Aphrodite, parce qu'elle fut nourrie de l'écume des mers ; Cythérée, parce qu'elle aborda Cythère, Cyprigénie, parce qu'elle naquit dans Chypre entourée de flots et Philomédée, parce que c'est d'un organe générateur qu'elle reçut la vie. Accompagnée de l'Amour et du beau Désir, le même jour de sa naissance, elle se rendit à la céleste assemblée. Dès l'origine, jouissant des honneurs divins, elle obtint du sort l'emploi de présider, parmi les hommes et les dieux immortels, aux entretiens des jeunes vierges, aux tendres sourires, aux innocents artifices, aux doux plaisirs, aux caresses de l'amour et de la volupté."
La sensualité mélancolique de Watteau, l'Embarquement pour Cythère, détail
Selon Homère, Aphrodite est fille de Zeus. Il lui donne pour mère Dioné, qui est pour certains, est une océanide, fille d'Océanos et de Thétys, et, pour d'autres, une titanide, fille de Gaïa et d'Ouranos (voir les pages Cosmogonie). Le nom de Dioné signifie "la déesse". Ainsi, l'honneur du dieu des dieux était sauf : la puissante Aphrodite, qui inspirait aux hommes et aux divinités la passion sexuelle, se trouvait ainsi "vassale" de Zeus par sa filiation.
Seules trois déesses ne succombèrent jamais aux enchantements d'Aphrodite : Athéna, Artémis et Hestia qui, jamais, ne s'unirent à aucun dieu ni à aucun mortel.
Cette double origine d'Aphrodite inspira à Socrate (à travers la plume de Platon, dans le Banquet) l'idée qu'il y eût deux Aphrodite, l'Aphrodite Ouranienne, fille du ciel et déesse de l'amour pur, et l'Aphrodite populaire, celle qui inspire le désir. Quoi qu'il en soit de sa naissance, c'est plutôt à l'Aphrodite populaire que se rapportent les légendes qui la mettent en scène.
Parmi les textes les plus anciens qui se rapportent à Aphrodite, nous ne pouvions résister à cet hymne composé par la poétesse Sappho qui fut, plus que tout et toute autre, inspirée par la déesse :
"Immortelle Aphrodite au trône brillant, fille de Zeus, noueuse de ruses, je t'en prie, ne brise pas mon âme sous l'angoisse et la douleur. Mais viens à ma prière, si jamais tu as entendu ma voix au loin, et écoute, et quitte le palais d'or de ton père sur ton char attelé. Qu'une nuée de charmants moineaux t'amènent, agitant leurs ailes rapides autour de la terre sombre, depuis le paradis jusqu'au milieu du ciel. Ils sont tôt arrivés et toi, bénie, souriant à la manière des immortels, tu me demandes ce qui s'est abattu sur moi et pourquoi je t'appelle et ce que, dans mon coeur affolé, je désire le plus voir. "Quelle beauté veux-tu maintenant conduire à t'aimer ? Qui te tourmentes, Sappho ? Même si maintenant elle fuit, elle te suivra bientôt, et si elle rejette les cadeaux que tu lui offres, et si elle ne t'aime pas, elle t'aimeras bientôt, quand bien même elle hésite". Viens, je t'en prie, dès maintenant, et soulage moi de ces cruels soucis. Et que tout ce que mon coeur désire voir accompli soit accompli par toi, et soit mon alliée."
Aphrodite quitta Cythère pour l'île de Chypre, à Paphos, où les Heures, les trois filles de Zeus et de sa seconde épouse, la titanide Thémis, l'accueillirent et la parèrent. C'est à Cythère et à Chypre que se trouvaient les plus anciens sanctuaires à la déesse. On peut penser que des populations venant du Moyen ou du Proche-Orient (probablement de Syrie, puisqu'une légende parle d'un roi syrien à Chypre) et qui adoraient une déesse de la fertilité aux caractéristiques proches d'Aphrodite, s'étaient installées dans ces îles.
Aphrodite possédait une ceinture magique : la femme ou la déesse qui la portait inspirait un désir impérieux à ceux qui la voyaient. Ainsi, dans l'Iliade, Homère raconte qu'Héra, épouse de Zeus, emprunta par ruse sa ceinture à Aphrodite, afin de conduire son époux aux plaisirs de la chair et de l'endormir. Poséidon put alors rejoindre le siège de Troie et secourir le clan grec.
Les Grecs donnent à la plus belle des déesses le mari le plus laid : Héphaïstos, le dieu boîteux des forgerons (Vulcain dans la trminologie latine). Mais ses amours avec le séduisant dieu des combats Arès sont célèbres. Citons Homère, qui conte cette histoire au Chant VIII de l'Odyssée (traduction adaptée de celle de Lecomte de Lisle) :
... l'Aède commença de chanter admirablement les amours d'Arès et d'Aphrodite à la belle couronne, comment, pour la première fois, ils s'unirent dans la demeure de Héphaïstos...
... Arès offrit de nombreux cadeaux pour séduire Aphrodite, et c'est ainsi qu'il déshonora la couche du dieu Héphaïstos. Hélios, le soleil, les avait vus s'unir, et, aussitôt, vint l'annoncer à Héphaïstos, qui entendit là de cruelles paroles. Puis, roulant en lui-même sa vengeance, il se hâta vers sa forge.
Ayant dressé une grande enclume, il forgea des liens qui ne pouvaient être ni rompus, ni dénoués. Après avoir achevé cette trame pleine de ruse, il se rendit dans la chambre nuptiale où se trouvait son cher lit. Et il suspendit de tous côtés, en cercle, ces liens qui tombaient des poutres autour du lit comme des toiles d'araignée que nul ne pouvait voir, pas même les Dieux bienheureux. Ce fut ainsi qu'il ourdit sa ruse. Et, après avoir enveloppé le lit, il feignit d'aller à Lemnos, ville bien bâtie, celle de toutes qu'il aimait le mieux sur la terre. Arès au frein d'or le surveillait, et quand il vit partir l'illustre ouvrier Héphaïstos, il se hâta, dans son désir d'Aphrodite à la belle couronne, de se rendre à la demeure de l'illustre Héphaïstos. Aphrodite, revenant de voir son tout-puissant père Zeus, était assise. Et Arès entra dans la demeure, il lui prit la main et lui dit :
- Allons, chère, dormir sur notre lit. Héphaïstos n'est plus ici ; il est allé à Lemnos, chez les Sintiens au langage barbare.
Vénus et Mars surpris par Vulcain, par le Tintoret. Mars (Arès), casqué, est caché sous la table. Cette scène, vaguement scabreuse, fait écho à la légende contée par Homère.
Il parla ainsi, et il sembla doux à la déesse de lui céder. Ils montèrent sur le lit pour y dormir, et, aussitôt, les liens habilement disposés par le subtil Héphaïstos les enveloppèrent. Ils ne pouvaient ni mouvoir leurs membres, ni se lever, et ils reconnurent alors qu'ils ne pouvaient fuir. L'illustre boiteux des deux pieds approcha, car il était revenu avant d'arriver à la terre de Lemnos, Hélios ayant veillé pour lui et l'ayant averti. Il rentra dans sa demeure, affligé en sa chère poitrine. Il s'arrêta sous le vestibule, où une violente colère le saisit, et il cria si horriblement que tous les dieux l'entendirent :
- Père Zeus, et vous, dieux bienheureux qui vivez éternellement, venez voir des choses honteuses et intolérables. Moi qui suis boiteux, la fille de Zeus, Aphrodite, me déshonore, et elle aime le pernicieux Arès parce qu'il est beau et qu'il ne boite pas. Si je suis laid, certes, je n'en suis pas cause, mais la faute en est à mon père et à ma mère qui n'auraient pas dû m'engendrer. Voyez comme ils sont couchés unis par l'amour. Certes, en les voyant sur ce lit, je suis plein de douleur, mais je ne pense pas qu'ils tentent d'y dormir encore, bien qu'ils s'aiment beaucoup ; ils ne pourront s'unir, et mon piège et mes liens les retiendront jusqu'à ce que son père m'ait rendu toute la dot que je lui ai livrée à cause de sa fille aux yeux de chien, parce qu'elle était belle.
Il parla ainsi, et tous les Dieux se rassemblèrent dans la demeure d'airain. Poséidon qui entoure la terre vint, et le très utile Hermès vint aussi, puis le royal archer Apollon. Les d éesses, par pudeur, restèrent seules dans leurs demeures. Et les dieux qui dispensent les biens étaient debout dans le vestibule. Et un rire immense s'éleva parmi les dieux heureux quand ils virent l'ouvrage du prudent Héphaïstos ; et, en le regardant, ils disaient entre eux :
- Les actions mauvaises ne valent pas la vertu. Le plus lent a atteint le rapide. Voici que Héphaïstos, bien que boiteux, a saisi, par sa science, Arès, qui est le plus rapide de tous les dieux qui habitent l'Olympe, et c'est pourquoi il se fera payer une amende.
Ils se parlaient ainsi entre eux. Et le dieu Apollon, fils de Zeus, dit à Hermès :
- Messager Hermès, fils de Zeus, qui dispense les biens, certes, tu voudrais sans doute être enveloppé de ces liens indestructibles, afin de coucher dans ce lit auprès d'Aphrodite d'or ?
Le messager Hermès lui répondit aussitôt :
- Plût aux dieux, ô royal archer Apollon, que cela arrivât, et que je fusse enveloppé de liens trois fois plus inextricables, et que tous les dieux et les déesses le vissent, pourvu que je fusse couché auprès d'Aphrodite d'or !
Il parla, ainsi, et le rire des dieux Immortels éclata. Mais Poséidon ne riait pas. Il suppliait l'illustre Héphaïstos de délivrer Arès. Il lui disait ces paroles ailées :
- Délivre-le, et je te promets qu'il te satisfera selon ton désir, comme il convient entre dieux immortels.
L'illustre ouvrier Héphaïstos lui répondit :
- Poséidon qui entoures la terre, ne me demande pas cela. Les cautions des mauvais sont mauvaises. Comment pourrais-je te contraindre, parmi les dieux immortels, si Arès échappait à sa dette et à mes liens ?
Poséidon qui ébranle la terre lui répondit :
- Héphaïstos, si Arès reniait sa dette et prenait la fuite, je te la paierai moi-même.
L'illustre boiteux des deux pieds lui répondit :
- Il ne convient pas que je refuse ta parole, et cela ne sera pas.
Ayant ainsi parlé, Sa Force Héphaïstos rompit les liens. Et les deux amants, libres des liens inextricables, s'élancèrent aussitôt dans les airs, Arès pour la Thace, et Aphrodite qui aime les sourires à Chypre, près de Paphos, là où se trouvent ses bois sacrés et ses autels parfumés. Là, les Charites la baignèrent et la parfumèrent d'une huile ambroisienne, comme celle qui convient aux dieux immortels, et elles la revêtirent de vêtements précieux, admirables à voir.
De honte, après Paphos, Aphrodite se retira dans les forêts du Caucase. Les dieux la cherchèrent longtemps, puis la trouvèrent sur l'indication d'une vieille femme qu'Aphrodite aussitôt transforma en rocher. Car il ne faisait pas bon irriter la vindicative déesse !
Hésiode, Théogonie :
Épouse du dieu Arès qui brise les boucliers, Cythérée (Aphrodite) engendra la Fuite et la Terreur, divinités funestes qui dispersent les épaisses phalanges des héros et parmi les horreurs de la guerre secondent la fureur d'Arès, ce destructeur des villes ; elle enfanta aussi Harmonie, que le magnanime Cadmus choisit pour épouse.
Pour Hésiode, c'est la plus jeune des Grâces, filles de Zeus, qu'eut pour épouse Héphaïstos.
Aphrodite se vantait d'avoir inspiré aux dieux de l'amour pour les femmes mortelles et de leur avoir fait naître des enfants sujets à la vieillesse et à la mort, alors qu'eux-même, nourris du nectar et de l'ambroisie, connaissaient jeunesse et vie éternelles. C'est pourquoi Zeus inspira à la belle déesse le désir pour le prince troyen Anchise... ainsi que le raconte Homère dans un hymne...
Ayant été l'amante d'Anchise et mère d'Énée, prince troyen, Aphrodite prit le parti des Troyens contre les Grecs lors de la guerre de Troie. Elle protégea son fils Énée dans la bataille et fut blessée par le guerrier grec Diomède. Emportée vers l'Olympe par Iris dans le char d'Arès, elle fut soignée par sa mère. Diomède eût été tué par Arès s'il n'avait pas été protégé par Athéna, amie des Grecs. Et, malgrè l'affront fait à Aphrodite, il rentra vivant et heureux de la guerre de Troie.
Arès et Anchise ne furent pas ses seuls amants. Aphrodite en eut de nombreux, qu'elle choisissait de préférence parmi les dieux. Elle s'unit à Hermès (et en conçut Hermaphrodite, créature à la fois homme et femme), à Poséidon, à Hélios le soleil, à Dyonisos... Mais sa passion la plus brûlante fut celle qu'elle voua à Adonis (l'histoire est plus connue sous le nom de "Vénus et Adonis"). Avec Anchise, Adonis fut le seul mortel qu'elle aima, du moins d'après les légendes que nous connaissons.
Son animal emblématique était la colombe, et comme les fleurs poussaient sous ses pieds quand elle marchait, les Latins ont assimilé Aphrodite à leur déesse des jardins, Vénus.
Fille de Persès et d'Astéria (voir notre page "Titans et Titanides"), et donc de la race des Titans, Hécate est restée une divinité majeure sous le règne de Zeus. Bienveillante selon les uns, magicienne redoutée selon les autres, jamais citée dans l'Iliade ni dans l'Odyssée, Hécate est l'une des divinités les plus mystérieuses du Panthéon grec.
Hécate, souvent représentée comme une triple-déesse.
Le texte le plus ancien évoquant Hécate est sans doute l'Hymne homérique à Déméter. L'auteur de ce poème évoque l'enlèvement de Pérséphoné, fille de Déméter, par le dieu des Enfers, Hadès.
Hécate fut la première divinité à assister Déméter, déesse des saisons et des moissons, lorsqu'elle recherchait sa fille sur la terre et sur les eaux. Et, lorsque la jeune déesse fut rendue à sa mère pour les deux tiers de l'année, selon l'ordre de Zeus, Hécate l'accueillit et devint sa compagne favorite.
Un siècle plus tard, très approximativement, Hésiode cite abondamment Hécate dans sa Théogonie. Il la présente comme la petite-fille des titans Cryos et Eurybié par Persès et de Coeos et Phoebé par Astéria. Il lui consacre pas moins de 41 vers pour affirmer qu'elle fut honorée par Zeus, qu'elle conserva ses prérogatives après la prise de pouvoir de celui-ci sur les Titans (voir "Cosmogonie") et pour détailler tous ses privilèges :
Devenue enceinte, Astéria donna l'existence à Hécate, que Zeus, fils de Cronos, honora entre toutes les déesses : il lui accorda de glorieux privilèges et lui permit de commander sur la terre et sur la mer stérile. Déjà, sous Ouranos couronné d'étoiles, elle avait obtenu cet emploi et jouissait des plus grands honneurs parmi les dieux immortels. Aujourd'hui, lorsqu'un des hommes, enfants de la terre, célèbre, selon l’usage, des sacrifices expiatoires, c'est Hécate qu'il invoque, et soudain la céleste faveur environne le suppliant dont la bienveillante déesse accueille les prières ; elle lui prodigue la richesse, car elle en a le pouvoir. Tous les privilèges partagés entre les nombreux enfants de la Terre et d'Ouranos, elle seule les réunit. Le fils de Cronos ne lui a ni dérobé ni arraché aucune des prérogatives qui lui échurent sous les Titans, ces premiers dieux ; elle conserve tout entière la part d'autorité qu'elle obtint dans l'origine. Fille unique, elle n'est ni moins respectée ni moins puissante sur la terre, dans le ciel et sur la mer ; son pouvoir est encore plus vaste, parce que Zeus l'honore. Quand elle veut favoriser un mortel, elle l'assiste avec empressement, et, selon sa volonté, elle le fait briller dans l’assemblée des peuples, lorsque les hommes s'arment pour le combat meurtrier, c'est elle qui, à son gré, se hâte de lui accorder la victoire et de prodiguer la gloire au vainqueur. Aux jours où l'on rend la justice, elle s'assied auprès des rois vénérables. Si elle voit des rivaux lutter dans l'arène, toujours propice, elle vient les encourager et les secourir ; l'athlète vainqueur par sa force et par sa constance mérite promptement un prix magnifique, et transporté d'allégresse, couvre de gloire sa famille. Quand elle le veut, elle protège les écuyers qui montent sur les chars ; également favorable aux navigateurs qui affrontent le trajet difficile de la mer azurée, elle exauce les voeux qu'ils adressent à Hécate et au bruyant Poséidon : cette illustre déesse leur procure aisément une abondante proie ou ne la leur montre que pour les en dépouiller si tel est son désir. Occupée avec Hermès à multiplier dans les étables les boeufs, les agneaux, les nombreux essaims de chèvres et de brebis à la toison épaisse, elle peut, comme il lui plaît, accroître ou diminuer les troupeaux. Rejeton unique de sa mère, elle vit comblée d'honneurs parmi tous les Immortels. Le fils de Cronos la chargea encore d'élever et de nourrir les humains qui, après elle, devaient voir la lumière de l'aurore au loin étincelante. Ainsi, dès le principe, elle devint la nourrice des enfants : tels sont ses nobles emplois.
Hésiode fait donc d'Hécate une divinité généralement bienveillante, du moins quand on l'invoque, et certainement très puissante.
Par contre, elle n'est jamais citée dans l'Iliade, ni dans l'Odyssée. Et pourtant, que ce soit dans l'une ou dans l'autre histoire, les héros auraient eu maintes fois l'occasion de l'invoquer, tant pour la victoire dans les batailles que lors des vicissitudes que traversa Ulysse.
Il n'est pas non plus fait mention d'Hécate jusqu'au IVe siècle avant JC, dans deux comédies d'Aristophane, les Grenouilles et les Femmes. Là, il évoque une fille d'Hécate nommée Empuse, sorte de vampire femelle, très proche de la créature évoquée dans le Talmud, Lilith. On passe étrangement d'une déesse bienveillante à la génitrice d'une créature monstrueuse...
Plus tard, c'est dans l'aventure de Jason et des Argonautes, écrite par Apollonios de Rhodes au IIIe siècle avant JC, que nous retrouvons Hécate : elle était la grande divinité de Colchide, et la magicienne Médée en était une prêtresse, "instruite par Hécate elle-même dans l'art des enchantements". Ainsi, Hécate est devenue déesse magicienne et, sans qu'il soit fait mention du moindre acte "déshonorant" de la part d'Hécate, les exactions qu'accomplira Médée par la suite participeront à la réputation de la déesse, au point qu'elle apparaisse comme maîtresse des trois immondes sorcières du Macbeth de Shakespeare.
Hécate était également honorée à Égine où, dit-on, Orphée lui-même institua des mystères à la déesse. Elle était représentée en statue à trois têtes dans les carrefours, hauts lieux magiques. Mais, comme pour les Titans ses aïeux, il est difficile de trouver des représentations de cette déesse crainte entre toutes.
Leto et ses enfants, Artemis et Apollon
Selon Hésiode, Léto (ou Latone selon la terminologie latine), mère d'Apollon et d'Artémis, fut la 5e compagne de Zeus.
Elle était fille des Titans Coeos et Phoebé. Selon le pseudo-Apollodore, sa soeur Astéria fut courtisée par Zeus et se transforma en caille pour lui échapper. Elle tomba dans la mer et devint l'île d'Ortygie (qui signifie "île aux cailles").
Zeus alors tenta de séduire la soeur, Léto, qui se changea elle aussi en caille, mais Zeus anticipa cette transformation et c'est sous forme de caille qu'il s'unit à elle.
Le pseudo-Apollodore, dans sa Bibliothèque, n'accorde que quelques mots à la naissance l'Apollon et d'Artémis : "Léto ayant cédé aux désirs de Zeus, Héra la chassa de toutes les terres, jusqu'au jour où Léto arriva à l'île de Délos (dont l'ancien nom est Ortygie), où elle mit au monde Artémis qui l'aida à accoucher d'Apollon".
Hygin, dans ses Fables, s'étend un peu plus longuement :
"... À cette époque, Zeus était épris de Léto. Quand Héra le découvrit, elle décréta que léto ne pourrait enfanter que là où le soleil ne brille jamais. Quand Python [un dragon de taille monstrueusse, rejeton de la Terre] découvrit que Léto était enceinte de Zeus, il la poursuivit afin de la tuer. Sur ordre de Zeus, le vent Aquilon emporta Léto et la confia à Poséidon. Il la protégea et, afin de ne pas s'opposer à l'ordre de Héra, il l'emporta sur l'île d'Ortygie, qu'il recouvrit de vagues. Comme il ne pouvait retrouver Léto, Python retourna au Mont Parnasse [Python rendait alors des oracles à cet endroit]. Mais Poséidon récompensa Ortygie, qui s'appela par la suite Délos, "la brillante". Là, Léto, qui se tenait à un olivier, mit au monde Apollon et Artémis, auxquels Héphaïstos, le dieu-forgeron, offrit des flèches. Quatre jours après sa naissance, Apollon vengea sa mère : il se rendit au Parnasse et abattit Python de ses flèches..."
Mais la version la plus belle et la plus fouillée de la légende, et aussi la plus ancienne, bien qu'elle vienne encore en contradiction avec les deux autres, provient d'un Hymne homérique (attribué à Homére, mais avec beaucoup de réserves). On trouvera le texte intégral de l'Hymne à Apollon sous le lien suivant : Hymne homérique I à Apollon. Voici un résumé des évènements :
Selon cet hymne, alors que Léto étais sur le point d'accoucher d'Apollon (car, ici, c'est Apollon qui naît le premier), elle s'adressa à l'île de Délos pour lui demander d'abriter son fils, car ils savaient que l'enfant qu'elle mettrait au monde serait un dieu puissant. Elle jura que son fils rendrait l'île prospère et qu'il y bâtirait un temple en son honneur, ainsi Délos accepta.
"Alors pendant neuf jours et pendant neuf nuits, Létô fut déchirée par les cruelles douleurs de l'enfantement. Toutes les déesses les plus illustres sont rassemblées autour d'elle. Dioné, Rhéa, Thémis [trois titanides] qui poursuit les coupables, la gémissante Amphitrite, toutes, à l'exception d'Héra aux bras d'albâtre : celle-ci resta dans le palais du formidable Zeus. Cependant la seule Ilithye, déesse des accouchements, ignorait cette nouvelle ; elle était assise au sommet de l'Olympe dans un nuage d'or et fut retenue par les conseils d'Héra qui ressentait une fureur jalouse parce que Létô, à la belle chevelure, devait enfanter un fils puissant et irréprochable."
Les autres déesses envoyèrent Iris, messagère des dieux, pour amener Ilithye en lui promettant un collier mêlé de fils d'or et long de neuf coudées, mais à l'insu d'Héra, de peur qu'elle ne l'arrête par ses paroles. Iris, arrivée à la demeure des dieux sur le sommet de l'Olympe, persuada l'âme d'Ilithye et toutes deux s'envolent vers Délos où elles trouvèrent Létô en proie aux plus vives douleurs. "Sur le point d'accoucher, elle entourait de ses bras un palmier et ses genoux pressaient la molle prairie. Bientôt la terre sourit de joie ; le dieu paraît à la lumière ; toutes les déesses poussent un cri religieux. Aussitôt, divin Phébus, elles te lavent chastement et te purifient dans une onde limpide et t'enveloppent dans un voile blanc, tissu délicat, nouvellement travaillé qu'elles nouent avec une ceinture d'or. Létô n'allaita pas Apollon au glaive étincelant. Thémis, de ses mains immortelles, lui offrit le nectar et la divine ambroisie..."
Dès qu'il eut goûté la nourriture des dieux, Apollon déchira ses langes et dit aux déesse :
"Qu'on me donne une lyre harmonieuse et des arcs recourbés et désormais je révélerai aux hommes les oracles certains de Zeus."
Il honora l'île de Délos en la rendant pareille à de l'or et en y fixant sa demeure.
L'hymne ne parle pas, par contre, de la naissance d'Artémis.
Selon Hésiode, Létô mit au monde Apollon le 7e jour de la nouvelle lune, ce qui en fait un jour sacré entre tous.
Iliade, chant 24 :
Niobé à la belle chevelure songea à prendre quelque aliment, quoique ses douze enfants eussent péri dans son palais, six filles charmantes, et autant de fils à la fleur de leur âge ; ce fut Apollon qui de son arc d’argent immola ceux-ci dans son courroux contre Niobé ; Artémis, qui se plaît à lancer des flèches, immola les jeunes filles, parce que leur mère avait osé s’égaler à la belle Léto : elle disait que Léto n’avait que deux enfants, et qu’elle-même avait produit une race nombreuse ; mais quoique deux seulement, ils immolèrent tous les enfants de Niobé. Durant neuf jours ils restèrent baignés dans leur sang ; nul ne se présenta pour les ensevelir : le fils de Cronos rendit ces peuples insensibles comme la pierre ; enfin le dixième jour ils furent ensevelis par les dieux habitants de l’Olympe. Toutefois Niobé, après avoir longtemps versé des larmes, songea à prendre quelque aliment ; maintenant, parmi les rochers et les monts déserts de Sipyle, où sont placées, dit-on, les grottes des nymphes qui conduisent les denses sur les rives de l’Achéloûs, la malheureuse Niobé, quoique changée en pierre, ressent encore les maux qui lui vinrent des dieux